Questions interdites et réglementation de l’entretien d’embauche

Julie
Questions interdites et réglementation de l’entretien d’embauche

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Les questions interdites et la réglementation de l’entretien d’embauche, ça vous évoque quelque chose ? Chaque étape de la procédure de recrutement, notamment l’entretien d’embauche, s’accompagne de la nécessité de respecter certains principes légaux. Pourquoi ? À vrai dire, c’est très simple : la tentation d’en apprendre davantage sur le postulant est grande, parfois au détriment du droit au respect de sa vie privée. De même, l’égalité entre les candidats doit être préservée. C’est pourquoi l’encadrement de l’entretien d’embauche apparaît comme un mal nécessaire !

Les obligations du recruteur lors de l’entretien d’embauche

Le déroulement de l’entretien d’embauche est-il encadré juridiquement ? Quelles sont les questions que le recruteur a le droit de poser ? Eh oui ! L’entretien d’embauche n’échappe pas à la règle. Durant cette étape cruciale du processus de recrutement, le recruteur est tenu au respect de certaines prescriptions légales.

La transparence des méthodes utilisées 

Connaissez-vous le cadre légal de l’entretien d’embauche ? Bien sûr, chacun mène son entretien de la façon dont il le souhaite. Toutefois, cette liberté s’avère limitative. 

Vous arrive-t-il, par exemple, de demander aux postulants de passer un test de connaissances ou de remplir un questionnaire ? Sachez que l’emploi de telles méthodes doit répondre à trois conditions : 

  • Le principe de transparence des méthodes utilisées. Au sens de l’article L 1221-8 du code du travail, vous devez informer le candidat des méthodes que vous souhaitez utiliser. Il peut s’agir de questionnaires, de tests, de mises en situation, etc.
  • La pertinence des méthodes utilisées. Comme dit plus haut, vous pouvez tout à fait recourir à un test professionnel ou une mise en situation au cours de vos différents entretiens. Cependant, veillez à ce que vos techniques de recrutement aient toujours un lien strictement direct avec l’emploi vacant. Autrement, elles sont considérées comme illégales au sens de l’article L 1221-6 du code du travail. En somme, qui dit entretien professionnel dit respect du cadre professionnel. 
  • La confidentialité des résultats. Peu importe la méthode de recrutement que vous décidez d’employer, les résultats doivent demeurer confidentiels.

Vous souhaitez contacter l’ancien ou l’actuel employeur du postulant ? Assurez-vous d’avoir recueilli son accord exprès. Pour garantir une sécurité juridique optimale, recourez à un écrit daté et signé de la main du candidat.

Le principe de non-discrimination à l’embauche

L’employeur a-t-il tout pouvoir lors de l’entretien d’embauche ? Non, bien sûr. Ce dernier doit respecter le cadre légal fixé par la loi. En effet, la législation française s’impose en tant que garante du principe de non-discrimination.

Bien entendu, certains professionnels du recrutement font sciemment usage de pratiques discriminantes. Désavantager un candidat par rapport à un autre, sur le fondement de critères discriminatoires, est sévèrement réprimé par la loi. Dans son article 225-2, le code pénal prévoit une peine d’emprisonnement de 3 ans et de 45 000 € d’amende. Aussi, la responsabilité pénale des infractions de discrimination s’applique également aux entreprises (art. 225-4 du code pénal).

Soyez vigilant : vous pouvez devenir l’auteur d’une discrimination, sans en avoir l’intention. Comment est-ce possible ? Eh bien, les stéréotypes et les préjugés ont parfois la vie dure. Certains publics, tels que les personnes transgenres, en sont régulièrement victimes. Malheureusement, dans tous les cas, cela nuit aux deux parties :

  • Le recruteur. Prenons l’exemple d’un stéréotype de genre. Le recruteur élimine d’office une candidate à un poste dont la fonction est genrée dans l’esprit de la majorité. Outre le fait qu’il s’agisse d’une pratique illégale, le professionnel du recrutement se prive potentiellement d’un talent. Ainsi, le législateur impose désormais une obligation de formation à la non-discrimination du personnel RH dans les entreprises spécialisées dans le recrutement et dans celles de plus de 300 salariés.
  • Le candidat. Face au processus de recrutement, le postulant discriminé subit un véritable préjudice. Sa recherche d’emploi est mise à mal. L’accès à certaines fonctions lui sont tout à fait inaccessibles. En bref, le principe d’égalité entre les citoyens est bafoué. À son échelle, l’État apporte une réponse engagée en faveur de la lutte contre les discriminations, notamment par la promotion de la discrimination positive en faveur des personnes handicapées.

Questions interdites et réglementation de l’entretien d’embauche : les questions autorisées et les interdictions légales

Quelles informations l'employeur peut-il demander au candidat pendant l'entretien d'embauche ? Quelles sont les questions interdites en entretien de recrutement ? Ensemble, décortiquons la pratique !

Le respect du cadre professionnel 

Bien évidemment, le rôle des chargés de recrutement est de poser des questions. Mais pas n’importe lesquelles ! Les informations que vous récoltez doivent vous permettre d’évaluer les aptitudes professionnelles du candidat. Ainsi, quelles sont les questions autorisées pendant l’entretien d’embauche ?

Vous pouvez l’interroger sur :

  • ses diplômes ;
  • son expérience professionnelle dans le secteur concerné ou au poste visé ;
  • la maîtrise des soft-skills en lien avec l’offre d’emploi ;
  • etc.

En bref, il existe une multitude d’informations à recueillir, sans pour autant dépasser le cadre professionnel.

Vous pouvez récolter les informations qui vous semblent pertinentes, tant qu’elles demeurent strictement liées à l’emploi visé. Toutefois, dans la pratique, la frontière entre la sphère privée et le cadre professionnel a tendance à être négligée. Dans ce cas de figure, le candidat est tout à fait en droit de refuser de divulguer les informations qui n’ont pas de lien avec sa candidature. 

Recruter sur le fondement de critères extérieurs aux compétences professionnelles est une grave erreur. En effet, cela constitue un véritable frein au succès de vos procédures de recrutement : employez des pratiques RH objectives ! Pourquoi ? Écarter la différence n’est pas vecteur de croissance. Bien au contraire, diversité et inclusion en entreprise en sont le socle.

Les interdictions légales

L’article 1132-1 du code du travail fait lumière sur l’interdiction de la discrimination au sein d’une procédure de recrutement. Ce fondement légal s’avère essentiel, d’autant que les pratiques discriminantes sont multiples et revêtent des formes distinctes. C’est pourquoi il est impossible de les traiter dans leur intégralité. Ci-dessous, nous vous présentons quelques exemples de discrimination et de questions prohibées :

  • Le sexe, l’état de grossesse ou la situation familiale. Bien plus courant qu’on le pense, ce motif discriminatoire a longtemps fait rage au sein du monde de l’entreprise. Le jugement du 8 novembre 2018 du Conseil des Prud’hommes de Rouen en est la parfaite illustration. Pour rappel, un recruteur laisse un message vocal à une candidate. Il justifie le rejet de sa candidature par le fait qu’elle s’avère susceptible d’avoir des enfants. Le refus d’embauche discriminatoire a été retenu. L’entreprise a été condamnée au versement de 10 000 € de dommages-intérêts. Aussi, les questions, telles que « êtes-vous marié ? » ou « avez-vous quelqu’un dans votre vie », sont prohibées.
  • L’orientation sexuelle, la vie sexuelle et l’identité de genre. Vous ne pouvez pas demander à un postulant s’il est hérétosexuel, gay, lesbienne, queer, ou encore, le nombre de partenaires qu’il fréquente intimement, etc. De plus, aucun candidat ne doit être sujet à un refus d’embauche en raison de son identité de genre.
  • La prétendue race, l’ethnie ou l’appartenance à une nation. Le 8 mars 2010, le Tribunal correctionnel de Versailles de Versailles condamne le gérant d’une entreprise qui a refusé d’embaucher un candidat, car ses ouvriers n’accepteraient pas d’avoir comme supérieur hiérarchique « un noir ». De même, le 16 octobre 2008, le Tribunal de Grande Instance de Paris condamne une boulangère au versement de 5 000 € d’amende et de 1 000 € de dommages-intérêts. Dans cette affaire, la discrimination raciale a été prouvée. « D’où venez-vous ? », « D’où provient votre accent ? » sont autant de questions interdites lors de l’entretien d’embauche.
  • Les croyances religieuses. Évidemment, il est prohibé de questionner le candidat sur sa religion et l’incidence de sa pratique sur sa prise de poste. 
  • L’appartenance syndicale et les convictions politiques. En tant que recruteur, vous ne pouvez pas demander à un candidat s’il est syndiqué, s’il appartient à un parti politique, pour qui il a voté aux dernières élections, etc.
  • L’apparence physique. Une candidate à un emploi de vendeuse réussit avec succès son entretien d’embauche. La responsable la contacte pour lui indiquer qu’elle obtiendrait le poste, à condition qu’elle se teigne les cheveux. Le motif discriminatoire a été retenu. Néanmoins, un accord amiable a été trouvé entre les parties. En outre, selon le 13ème baromètre de la perception des discriminations dans l’emploi, 23 % des personnes actives estiment avoir été victimes d’une discrimination au cours du processus de recrutement ou sur leur lieu de travail. Le principal facteur de discrimination retenu est l’apparence physique (40%).

Peut-on dénoncer un entretien d’embauche ? Un candidat peut tout à fait décider de saisir la justice, suite à un refus d’embauche qu’il juge discriminatoire. Bien sûr, cela demeure une infraction difficile à prouver. Peu de condamnations sont effectivement prononcées. Néanmoins, à l’ère des réseaux sociaux, il n’a jamais été aussi facile de dénoncer les mauvaises pratiques RH d’une entreprise. Aujourd’hui, la mauvaise publicité est suffisamment dévastatrice.

Les différences de traitement autorisées

Que ce soit à l’échelle nationale ou européenne, la lutte contre les discriminations en entreprise demeure au cœur des préoccupations sociétales. Cependant, des différences de traitement peuvent tout à fait être admises, du moment où elles sont conforme à : 

  • une exigence professionnelle essentielle, proportionnée et déterminante ;
  • un but légitime.

En effet, un candidat peut être défavorisé en raison de son âge. Aussi, l’entretien de recrutement peut s’achever sur un refus afin de préserver : 

  • la santé du candidat ;
  • sa sécurité ;
  • son emploi actuel ; 
  • son indemnisation en cas de licenciement ;
  • etc.

Vous devez savoir que la réalisation de certains travaux est strictement interdite aux travailleurs mineurs. De plus, afin d’assurer la sécurité des plus fragiles, c’est-à-dire les jeunes et les seniors, l’entreprise peut mettre en place une interdiction d’accès au poste visé. Dans ce cas, si l’entretien RH aboutit à un refus d’embauche, ce dernier ne constitue pas une infraction.

En outre, il n’est pas rare qu’une entreprise fixe un âge maximum en matière de recrutement. Cette pratique demeure légale, si elle est justifiée par la nécessité d’une période d’emploi minimale avant le départ à la retraite du salarié.

Concernant l’état de santé et l’inaptitude professionnelle, la visite médicale peut interrompre le processus de recrutement. En effet, malgré un entretien d’embauche réalisé avec succès, les constatations du médecin du travail s’avèrent déterminantes. Toutefois, celles-ci doivent revêtir un caractère nécessaire, objectif et approprié. Dans ce cas, le refus d’embauche est tout à fait admis par la loi.

L'article L. 1133-5 du code du travail prévoit également la possibilité de privilégier les postulants issus de certains secteurs géographiques. Pour ne pas être constitutive de discrimination, la mesure prise doit avoir pour but de rétablir l’égalité entre les traitements. En effet, le lieu de résidence a rejoint le rang des critères discriminatoires en 2014, avec pour objectif de lutter contre les mauvaises pratiques de recrutement, parmi lesquelles : 

  • écarter tous les candidats issus d’un secteur géographique, objet de préjugés ; 
  • rejeter les candidatures qui, selon le recruteur, se trouvent trop éloignées du lieu de travail. 

Enfin, il existe d’autres différences de traitement codifiées par la loi, telles que fondées sur la vulnérabilité de la personne ou sur son sexe. Cependant, le plus souvent, celles-ci sont rencontrées à d’autres moments du processus du recrutement.

Désormais, vous êtes incollable sur les questions interdites et la réglementation de l’entretien d’embauche. Les pratiques RH n’ont de cesse d’évoluer : le chemin à parcourir reste encore long, toutefois ! Toutes les cartes sont entre les mains des recruteurs d’aujourd’hui et de demain. C’est à eux que revient la tâche de faire du recrutement inclusif leur priorité n°1. Besoin d’opérer une préqualification de vos candidatures de manière humaine ? Découvrez la solution innovante Visiotalent.

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À propos de l'auteur·e
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Juriste en Droit des Affaires et Content Manager Freelance. Lorsque je ne suis pas occupée à dévorer un roman ou à faire du canicross, j’écris des articles de blog sur l'univers RH (et le droit !)