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Cet article est une synthèse du live. Rien ne vaut le visionnage complet. ☕ Un grand merci à Anaïs, Vanessa, Boussad et Virgile.
L'intelligence artificielle n'est plus un concept futuriste, mais une réalité tangible qui s'infiltre dans tous les métiers, y compris le recrutement. Loin des clichés de robots remplaçant les humains, l'IA se présente aujourd'hui comme un puissant levier pour augmenter les capacités des recruteurs, leur permettant de se délester des tâches chronophages pour se concentrer sur l'essentiel : la relation humaine.
C'est le sujet qui a été au cœur du dernier live de la saison de la "caméra café du recrutement", une discussion passionnante d’Anaïs Le Digarcher avec des experts (👑) du domaine :
- Vanessa, recruteuse chez VeryUp et TeachUp,
- Olivier, créateur de contenu spécialisé en recrutement & IA,
- Virgile, recruteur et "recops".
Ensemble, ils ont décortiqué les différents niveaux d'autonomie de l'IA, de la simple automatisation à l'agent conversationnel autonome, en illustrant leurs propos de cas d'usages concrets et inspirants. Cet article vous propose une synthèse détaillée de leurs échanges.
Les concepts clés : faire la différence entre automatisation, assistant et agent IA
Pour naviguer dans l'univers de l'IA, il est crucial de bien comprendre le vocabulaire. Les intervenants ont insisté sur la nécessité de clarifier ces termes souvent confondus.
- L'automatisation simple : C'est la base. Il s'agit d'un processus déterministe qui suit des règles fixes, du type "si A se produit, alors faire B". Comme une macro Excel, elle exécute toujours la même séquence d'actions. Efficace pour des tâches répétitives, elle ne possède aucune intelligence et génère une erreur si une situation sort du cadre prévu.
- L'automatisation avec des briques d'IA : Ici, on insère une dose d'intelligence dans un processus automatisé. Par exemple, après avoir sourcé une liste de profils, une IA peut être utilisée pour les classer ou les scorer (tiers 1, 2 ou 3) selon des critères prédéfinis.
- L'assistant IA : C'est un outil conversationnel comme ChatGPT. Il est capable de comprendre une demande et de générer du contenu (texte, code, etc.) en réponse. Cependant, il reste passif : il répond aux instructions mais ne prend aucune initiative. Il peut rédiger une trame d'entretien, mais il ne l'enverra pas et ne planifiera pas le rendez-vous.
- L'agent IA : C'est le niveau supérieur. Un agent est un système autonome qui combine un modèle de langage (LLM), un contexte riche (accès à des données, des règles, des objectifs) et un protocole d'action. Il ne se contente pas de répondre, il agit. Un agent IA peut interagir avec vos outils (calendrier, boîte mail, Slack), prendre des décisions intermédiaires et poursuivre un objectif de manière proactive, sans intervention humaine directe.
Cas d'usages concrets : quand l'IA allège la charge mentale du recruteur
La théorie est une chose, la pratique en est une autre. Les experts ont partagé plusieurs exemples concrets de la manière dont ils utilisent ces technologies pour optimiser leur travail.
1. L'automatisation du pré-onboarding pour ne plus rien oublier
Vanessa a partagé un cas d'usage d'automatisation simple mais terriblement efficace pour gérer la période sensible entre l'acceptation d'une offre et l'arrivée d'un nouveau collaborateur. Son objectif : gagner en fiabilité, en réactivité et réduire sa charge mentale.
Le processus, déclenché manuellement via un fichier Excel, enchaîne une série d'actions programmées :
- Rappel d'appel pour célébrer la nouvelle et récolter des informations.
- Emails automatiques aux collègues pour la logistique (matériel, accueil).
- Rappel à J-15 pour réserver le déjeuner d'intégration.
- Message automatique à J-7 sur Teams pour annoncer l'arrivée.
- Alertes et rappels pour le suivi avec le manager et la préparation du jour J (signature du contrat, croissants, etc.).
Ce workflow, construit avec des outils comme Make, Zapier ou N8N, est purement déterministe (sans IA conversationnelle) mais permet un gain de temps considérable. Vanessa estime le retour sur investissement à environ six mois, pour une mise en place initiale de quatre heures.
L’exemple partagé partagé par Vanessa pendant le live faisait uniquement référence à une partie de l’automatisation du pré-onboarding : celle liée à l’organisation logistique du J1. C’était un exemple volontairement simple, facile à présenter et à illustrer.Mais bien sûr, le pré-onboarding ne se limite pas à cette dimension. Il intègre aussi d’autres actions, elles aussi automatisées, comme :• le maintien du lien via une communication régulière en amont avec le nouveau collaborateur,• la préparation du parcours d’onboarding (en lien avec le manager et les compétences identifiées), etc.En résumé, l’automatisation couvre l’ensemble de la phase pré-onboarding, avec des actions ciblées et complémentaires, le J1 n’en est qu’une petite partie.
2. Le "Brief Manager" : un GPT pour des lancements de poste plus stratégiques
En collaboration avec Olivier, Vanessa a développé un GPT personnalisé pour optimiser la phase de brief avec les managers. Plutôt que de multiplier les réunions, le manager utilise un chatbot qui, en 5 à 10 minutes, le guide à travers une série de questions clés sur le besoin, les missions et le profil recherché.
Le recruteur reçoit ensuite la conversation et l'injecte dans un second GPT, le "GPT Recruteur", qui structure un brief de poste complet, propose une trame de fiche de poste, des compétences clés et même une stratégie de sourcing (mots-clés, entreprises cibles). Le recruteur arrive ainsi à l'unique réunion synchrone avec le manager avec une base de travail solide, rendant l'échange plus stratégique et efficace. L'adoption, d'abord testée avec des managers technophiles, s'est généralisée grâce à des démonstrations simples et à la valeur ajoutée évidente de l'outil.
Le futur est déjà là : les agents IA autonomes en action
Virgile a ensuite présenté le potentiel des agents IA. En connectant un modèle de langage comme Claude à ses outils du quotidien (Gmail, Google Calendar, Slack) via un protocole standard, il a montré comment l'IA peut devenir un véritable assistant proactif.
L'utilisateur garde un contrôle total sur les permissions (l'agent peut-il lire les emails ? Y répondre ? Créer un brouillon ?), ce qui est essentiel pour la sécurité. Une fois configuré, l'agent peut :
- Gérer une boîte mail : archiver les promotions, résumer les newsletters, et envoyer une alerte Slack pour les messages jugés importants.
- Coordonner des agendas : trouver un créneau commun entre plusieurs personnes et envoyer l'invitation, une tâche simple mais très chronophage.
- Enrichir des données : remplir un Google Sheet avec des informations sur des entreprises (description, domaine, etc.) en allant chercher l'information sur le web.
- Répondre aux questions RH : agir comme un chatbot interne sur Slack, répondant aux questions récurrentes des collaborateurs (congés, avantages...) et escaladant vers un humain si la question est trop complexe.
Ces exemples montrent que nous passons d'une automatisation guidée à une automatisation augmentée, où l'IA agit à la place de l'utilisateur dans un environnement maîtrisé.
Le recruteur de demain : vers un rôle de pilote, pas d'ingénieur
Face à ces démonstrations, une question se pose : les recruteurs devront-ils tous devenir des experts techniques ? La réponse des intervenants est unanime : non.
Ces technologies ont vocation à être intégrées nativement dans les outils que les recruteurs utilisent déjà (ATS, CRM). Il ne sera pas nécessaire de savoir coder un agent IA. En revanche, de nouvelles compétences deviendront fondamentales :
- Le prompting : L'art de formuler une instruction claire et précise à une IA pour en obtenir le meilleur résultat.
- L'esprit critique : La capacité à superviser, vérifier et valider le travail de l'IA. La technologie assiste, mais la réflexion humaine et la validation finale restent primordiales.
- La culture de la sécurité : Comprendre où vont les données et comment elles sont traitées (RGPD, DPA) est non négociable.
L'objectif n'est pas de remplacer l'humain, mais de le libérer. En déléguant les tâches administratives et répétitives à l'IA, le recruteur peut enfin se consacrer pleinement à ses missions à plus forte valeur ajoutée : la stratégie de recrutement, le conseil aux managers, et surtout, la construction d'une relation de qualité avec les candidats.
Conclusion : l'IA, un levier d'émancipation au service de l'humain
L'évolution du recrutement avec l'IA suivra probablement le chemin d'autres innovations technologiques : une certaine méfiance initiale laissera place à une adoption généralisée lorsque l'utilité sera prouvée et l'usage simplifié. Pour certains recrutements à très grand volume (restauration rapide, intérim), l'IA gère déjà une grande partie du processus. Pour les postes plus complexes, l'humain reste et restera au centre.
Le message final de cette discussion est résolument optimiste. L'IA n'est pas une menace, mais une formidable opportunité. Elle offre au recruteur la possibilité de s'émanciper des tâches sans valeur pour devenir un véritable pilote de processus, un orchestrateur de talents, avec un rôle plus stratégique et une casquette "RecOps" intégrée. En fin de compte, l'IA permet de préserver et d'enrichir ce qui fait le cœur de ce métier : l'humain.