Loi de partage de la valeur : de quoi s’agit-il ?

Julie
Loi de partage de la valeur : de quoi s’agit-il ?

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Loi de partage de la valeur : décryptage

Le partage de la valeur est devenu un pilier majeur du dialogue social et de la compétitivité des entreprises. Depuis plusieurs années, la France cherche à mieux associer les salariés aux performances économiques de leur entreprise, à travers des dispositifs tels que la participation, l’intéressement ou encore l’épargne salariale.

Promulguée le 29 novembre 2023, la loi sur le partage de la valeur concrétise cette ambition.

Elle s’appuie sur l’accord national interprofessionnel (ANI) du 10 février 2023, signé à l’unanimité par les partenaires sociaux, et vise à généraliser le partage des bénéfices à toutes les entreprises, y compris les plus petites.

Depuis le 1er janvier 2025, la plupart de ses mesures sont pleinement entrées en vigueur, et marquent une évolution majeure dans la relation entre employeurs et salariés.

Objectif : rendre le partage de la valeur plus simple, plus équitable et plus universel, tout en favorisant le pouvoir d’achat et la fidélisation des collaborateurs.

Mais concrètement, que change cette loi ? Quelles entreprises sont concernées ? Et comment se traduisent ces nouvelles obligations ? Place au décryptage !

Quelles sont les différentes ambitions de la loi de partage de la valeur ?

Vous en avez sans doute entendu parler : la loi sur le partage de la valeur a fait couler beaucoup d’encre. Adoptée fin 2023, elle est désormais pleinement applicable dans les entreprises depuis 2025.
Mais savez-vous vraiment ce qu’elle change concrètement ? Quels sont les nouveaux dispositifs instaurés, les entreprises concernées, et les opportunités à saisir pour mieux associer les salariés aux performances de leur entreprise ?

N’attendons pas plus longtemps : faisons le point sur les ambitions et les effets réels de cette loi, qui entend transformer durablement la façon dont se partage la richesse produite au sein des entreprises françaises.

Comprendre les notions fondamentales

Avant de nous lancer dans l’étude de la loi sur le partage de la valeur, revoyons les bases. Prêt ? Définissons 3 catégories d’avantages salariaux triées sur le volet !

  • La participation. Celle-ci offre aux salariés la possibilité de recevoir une partie des profits générés par leur entreprise. Obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés, elle peut désormais être mise en place volontairement dans les plus petites structures, selon des modalités assouplies.
  • L’intéressement. Il s’agit d’un dispositif qui lie les salariés aux performances économiques ou extra-financières (sociales, environnementales…) de leur entreprise. Il repose sur une formule de calcul librement négociée et peut s’ajouter à la participation. La loi facilite désormais sa mise en œuvre, notamment pour les PME.
  • Les plans d’épargne salariale et retraite. Il en existe différents types, tels que le plan épargne entreprise (PEE), le plan épargne retraite (PER) anciennement Plan Épargne pour la retraite collective (PERCO).

👉 Le Plan d’Épargne Entreprise (PEE) permet aux dirigeants de PME et aux salariés d’investir dans diverses valeurs mobilières.

👉 Le Plan d’Épargne pour la Retraite Collectif (PERCO), remplacé depuis 2019 par le PER, n’existe plus que pour celles et ceux qui en ont ouvert un avant le 1er octobre 2019 — mais ces plans peuvent toujours recevoir des versements.

👉 Depuis l’adoption de la loi PACTE, le plan épargne retraite (PER) est la nouvelle innovation en matière d’épargne retraite.

📌 Bon à savoir : la loi de 2023 encourage aussi la création de plans de partage de la valorisation de l’entreprise, un nouveau mécanisme qui récompense les salariés lorsque la valeur de leur société augmente.

Renforcer le dialogue social 

Au-delà des dispositifs financiers, la loi sur le partage de la valeur réaffirme une conviction : aucun partage durable ne peut exister sans dialogue social solide.

C’est pourquoi elle s’appuie sur les branches professionnelles et les entreprises pour rendre la négociation plus régulière, plus claire et plus inclusive.

Première nouveauté : La loi avait prévu l’obligation, pour les branches dont les classifications n’avaient pas été révisées depuis plus de cinq ans, d’engager une négociation avant le 31 décembre 2023. Ces discussions ont permis de moderniser plusieurs grilles et d’ancrer davantage la transparence salariale dans les branches.

L’objectif ?

Actualiser les grilles de classification, mieux reconnaître les compétences, et renforcer la transparence sur les parcours et les rémunérations.

Ces discussions de branche s’inscrivent dans une dynamique plus large : celle d’un dialogue social orienté vers l’égalité professionnelle et la reconnaissance du travail réel.
Les employeurs sont désormais incités à intégrer ces thématiques dans leurs négociations annuelles obligatoires (NAO), notamment autour de :

  • la valorisation des résultats collectifs ;
  • la mixité des emplois et l’égalité femmes-hommes ;
  • et la répartition des performances extra-financières (sociales, environnementales, etc.).

Faciliter le partage de la valeur au sein des entreprises

Au cœur de la loi sur le partage de la valeur se trouve une ambition claire : généraliser le partage des résultats au sein des entreprises, quelle que soit leur taille.

Prêt ? Décortiquons ensemble le noyau dur de cette réforme désormais pleinement entrée en vigueur. C’est parti !

#1 Les nouvelles obligations pour les entreprises de 11 à 49 salariés

Depuis le 1er janvier 2025, les entreprises qui emploient au moins 11 salariés, constituées sous forme de société et ayant dégagé un bénéfice net fiscal positif représentant au moins 1 % du chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs, doivent mettre en place un dispositif de partage de la valeur.


L’employeur peut choisir librement la formule la plus adaptée :

  • intéressement ; 
  • participation ; 
  • plan d’épargne salariale ; 
  • prime de partage de la valeur (PPV).

Ces obligations, initialement expérimentales, sont désormais inscrites dans le droit commun. Elles visent à renforcer la cohésion au sein des entreprises tout en soutenant le pouvoir d’achat.

# 2 Le traitement des bénéfices exceptionnels

Autre nouveauté majeure : lorsqu’une entreprise de plus de 50 salariés réalise des bénéfices dits exceptionnels, elle doit ouvrir une négociation sur le partage de ces résultats.

Les modalités de calcul et les critères permettant de qualifier un bénéfice d’« exceptionnel » doivent être fixés dans l’accord collectif d’intéressement ou de participation — la loi laisse aux partenaires sociaux le soin d’en définir les contours.

# 3 La pérennisation de la prime de partage de la valeur (PPV)

La prime de partage de la valeur, successeur de la « prime Macron », est pérennisée.

Depuis 2024, elle peut être versée jusqu’à deux fois par an et, sous certaines conditions, être placée sur un plan d’épargne salariale (PEE ou PER collectif).

Jusqu’au 31 décembre 2026, les salariés des entreprises de moins de 50 personnes, rémunérés à moins de trois fois le SMIC, bénéficient encore d’une exonération totale d’impôt et de cotisations sociales sur cette prime.

Simplifier la mise en place de dispositifs de partage de la valeur

Le partage de la valeur, c’est bien — à condition que sa mise en œuvre ne devienne pas un casse-tête administratif.
Sur ce point, la loi du 29 novembre 2023 a voulu frapper fort : simplifier, harmoniser et moderniser les dispositifs existants pour que chaque entreprise, même petite, puisse passer à l’action sans se perdre dans la paperasse.

Première avancée : l’alignement des règles entre intéressement et participation. Les deux dispositifs obéissent désormais à des logiques proches, ce qui facilite leur gestion au quotidien et leur compréhension par les salariés.

Deuxième changement : la durée maximale des accords d’intéressement et de participation passe à cinq ans (contre trois auparavant). Une mesure saluée par les entreprises, qui peuvent ainsi inscrire ces dispositifs dans la durée et stabiliser leurs politiques de rémunération.

Autre simplification : la dématérialisation des accords. Les employeurs peuvent désormais conclure, déposer et gérer leurs dispositifs par voie électronique sur la plateforme TéléAccords, avec des modèles types proposés par l’administration. Objectif : démocratiser ces outils et réduire les freins à leur adoption, notamment dans les TPE et PME.

Enfin, la loi ouvre la prime de partage de la valeur (PPV) — anciennement « prime Macron » — à de nouvelles structures, notamment celles de l’économie sociale et solidaire.

Les entreprises peuvent aussi, si elles le souhaitent, intégrer la PPV à un plan d’épargne salariale, une manière concrète de renforcer l’épargne à long terme des salariés.

Développer l’actionnariat salarié

La loi sur le partage de la valeur ne se limite pas aux primes et à l’intéressement : elle entend aussi associer les salariés à la réussite et à la valorisation de leur entreprise.
Objectif : faire du salarié un véritable acteur de la performance collective.

Pour cela, elle introduit une innovation majeure : le plan de partage de la valorisation de l’entreprise (PPVE).
Ce dispositif, ouvert à toutes les entreprises, permet de verser une prime aux salariés lorsque la valeur de l’entreprise augmente sur une période donnée, par exemple entre deux évaluations ou en cas de progression de la valeur des titres.

Le PPVE s’applique à l’ensemble des salariés éligibles selon les critères définis dans l’accord (ancienneté, présence, etc.).Concrètement, si la valorisation de l’entreprise croît, les salariés perçoivent une somme proportionnelle à cette hausse — une manière d’intéresser chacun à la performance globale, sans pour autant modifier le capital social.

💡 Bon à savoir : le PPVE bénéficie du même régime social et fiscal avantageux que la participation.
Les sommes perçues peuvent être placées sur un plan d’épargne salariale (PEE ou PER collectif) pour profiter d’une exonération d’impôt sur le revenu, dans les limites prévues par la loi.

Enfin, la loi encourage également le développement de l’actionnariat salarié classique, en simplifiant la mise en place des augmentations de capital réservées aux salariés et en facilitant l’accès à des fonds d’investissement responsables dans les plans d’épargne d’entreprise.

La loi sur le partage de la valeur : progrès… ou fausse bonne idée ?

Deux ans après sa promulgation, la loi sur le partage de la valeur continue d’alimenter le débat.
Pour beaucoup d’entreprises, elle offre des leviers concrets pour associer les salariés aux résultats (participation, intéressement, PPV, épargne salariale) et soutenir le pouvoir d’achat.

D’autres soulignent toutefois un point de vigilance : ces dispositifs, souvent exonérés totalement ou partiellement de charges et/ou d’impôt selon les cas, ne remplacent pas une politique d’augmentations générales ou individuelles. Autrement dit, le partage de la valeur peut compléter la rémunération, mais ne devrait pas se substituer à la revalorisation du salaire de base.

En pratique, l’enjeu est donc double :

  • utiliser les outils de partage pour reconnaître les performances collectives et fidéliser ;
  • maintenir un cap salarial lisible (grilles, critères, NAO) pour garantir une progression durable des rémunérations.

Bref, le dispositif est utile… à condition d’être pensé comme un complément au dialogue social et non comme un substitut au salaire.

La loi sur le partage de la valeur consacre une idée simple : la performance d’une entreprise se construit collectivement, et ses fruits doivent être partagés équitablement.
En généralisant les dispositifs d’intéressement, de participation et d’épargne salariale, elle encourage les entreprises — y compris les plus petites — à associer leurs salariés à la réussite commune, tout en renforçant le pouvoir d’achat.

Mais au-delà des outils, cette réforme marque surtout une évolution culturelle : celle d’un modèle de rémunération plus collaboratif, plus transparent et mieux ancré dans le dialogue social.
Sa réussite dépendra désormais de la capacité des entreprises à s’en emparer pleinement, non par contrainte, mais comme une opportunité stratégique pour motiver, fidéliser et donner du sens à la performance collective.

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À propos de l'auteur·e
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Juriste en Droit des Affaires et Content Manager Freelance. Lorsque je ne suis pas occupée à dévorer un roman ou à faire du canicross, j’écris des articles de blog sur l'univers RH (et le droit !)