Osez la semaine de 4 jours

Marie-Sophie Zambeaux
Osez la semaine de 4 jours

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Janvier 2023, 21% des Français déclarent que le travail est très important pour eux contre 60 % en 1990. [1] La chute est vertigineuse ! Le travail occupe ainsi une place de moins en moins centrale et structurante dans notre vie. C’est un fait constaté ces dernières années, enquête après enquête, qui traduit un changement fondamental de notre rapport au temps de travail, à l’espace de travail ainsi qu’à la culture managériale.

Certains l’ont bien compris et ont décidé de prendre le taureau par les cornes et de proposer des solutions pour répondre aux attentes de plus en plus pressantes des collaborateurs et candidats concernant un meilleur équilibre vie privée/ vie professionnelle et une plus grande flexibilité des horaires.

Parmi les solutions possibles, une se démarque fortement ces dernières années et trouve de plus en plus d’écho aussi bien dans les médias qu’auprès des salariés : il s’agit de la semaine de 4 jours.

Jugée tour à tour géniale, révolutionnaire, utopique ou perçue comme une hérésie, elle ne laisse, il faut bien l’avouer, personne indifférent et il y a fort à parier qu’elle deviendra un sujet majeur pour les entreprises dans les mois à venir. À l’heure où j’écris ces lignes, Gabriel Attal vient d’ailleurs d’annoncer une expérimentation dans les ministères.

Aussi, je vous propose de disséquer aujourd’hui ce dispositif de la semaine de 4 jours en m’appuyant sur l’ouvrage de référence en la matière à savoir « Osez la semaine de 4 jours » de Laurent de la Clergerie, PDG fondateur du Groupe LDLC, [2] première grande entreprise française à avoir franchi le pas. Il y explique comment et pourquoi il a mis en place, le 25 janvier 2021, la semaine de 4 jours pour l’ensemble de ses 1100 collaborateurs passant ainsi à 32 heures de travail par semaine et ce sans baisse de salaire. Il y détaille également et largement les bénéfices retirés aussi bien pour les collaborateurs que pour l’entreprise même. Et sans trahir un secret, il ne regrette pas du tout et ne voudrait pour rien au monde faire machine arrière et revenir à la semaine de 5 jours même en temps de crise et turbulences économiques. C’est parti !

Semaine de 4 jours, un dispositif protéiforme qui n’est pas nouveau !

Mais en fait, qu’est-ce que la semaine de 4 jours ? Que nous soyons bien alignés avant d’aller plus en avant. Eh bien, il s’agit d’une forme d’organisation du temps de travail qui consiste à répartir le travail des salariés sur 4 jours dans la semaine au lieu de 5 avec ou non une réduction du temps de travail hebdomadaire à la clé mais avec le maintien du salaire et des avantages sociaux. [3]

C’est un concept qui est loin d’être nouveau en France puisque la loi Robien, dite « loi relative à l'aménagement et à la réduction du temps de travail » , adoptée en 1996 permettait l'expérimentation de la semaine de 4 jours à condition de respecter quelques conditions : le temps de travail hebdomadaire ne devait pas dépasser 32 heures, l’entreprise devait créer 10 % d'emplois nouveaux en CDI, les salariés devaient être volontaires pour passer à la semaine de 4 jours et cette expérimentation était limitée à 3 ans. La loi Robien a été abrogée en 2000 par la loi Aubry II, mais les entreprises qui avaient déjà mis en place la semaine de 4 jours ont, concrètement, pu la conserver. C’est le cas, entre autres, de Fleury Michon.

De nombreuses modalités et configurations existent pour mettre en place la semaine de 4 jours en fonction des besoins spécifiques propres à chaque organisation. Voici les plus courantes :

  • Semaine de 4 jours avec compression du temps de travail hebdomadaire sur 4 jours versus 5 jours avec, au final, le même volume d’heures travaillées chaque semaine. Ainsi, les salariés auront des journées de travail plus longues pour compenser et récupérer les heures non effectuées le 5ème jour. Par exemple, pour un salarié aux 35H, il effectuera 8H45 par jour sur 4 jours versus 7H par jour sur 5 jours.
  • Semaine de 4 jours avec réduction de la durée de travail hebdomadaire en maintenant ou en augmentant la durée de travail quotidienne. Par exemple, une entreprise peut proposer à ses salariés de travailler 8 heures par jour sur 4 jours soit 32 heures au global et ce pour le même salaire versus 7 heures par jour sur 5 jours soit 35 heures initialement. C’est la modalité choisie par le Groupe LDLC.
  • Semaine de 4 jours avec fermeture ou non de l’entreprise un jour fixe dans la semaine.
  • Semaine de 4 jours appliquée à tous les collaborateurs ou uniquement à certains services ou équipes ou bien uniquement sur la base du volontariat.

Maintenant que le concept est défini, passons aux avantages de la mise en œuvre de ce dispositif ! Et débutons par le plus évident à savoir les avantages perçus et vécus par les collaborateurs.

Avantages pour les collaborateurs

En premier lieu, il est important de rappeler que la semaine de 4 jours est une attente forte des collaborateurs et candidats confondus. Ainsi selon un sondage mené par l’Institut YouGov pour le HuffPost à l’occasion du 1er mai 2023, on apprend que 75 % des personnes interrogées se déclarent pour le passage à la semaine de 4 jours sans perte de salaire [4] considérant que le télétravail ne suffit plus à répondre à leur problématique d’équilibre vie pro/vie perso.

Parmi les principaux avantages, on peut citer :

  1. ⚖️ Meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle : Cela va sans dire que l’octroi d’un jour de congé ou de liberté en plus par semaine aux collaborateurs leur permet de mieux concilier leur vie personnelle et professionnelle. Ils ont ainsi une journée supplémentaire à consacrer à leurs loisirs/passions, à leur famille et amis ou bien à la gestion des rendez-vous du quotidien (passer à la Poste, rendez-vous médical etc.). Ils peuvent aussi en profiter pour prendre soin d’eux-mêmes et se reposer vraiment.  Quel que soit leur choix, cela leur permet de se réaliser pleinement.
  2. ⏬ Diminution de la fatigue, de l’épuisement et du stress : Cette journée de repos supplémentaire permet aux salariés de voir leur niveau aussi bien de fatigue que d’épuisement et de stress diminuer. C’est ce qui ressort d’une vaste expérimentation britannique de la semaine de 4 jours pendant 6 mois au sein de 61 entreprises coordonnée par des chercheurs en sciences sociales de l’Université de Cambridge. Les chiffres sont éloquents et parlent d’eux-mêmes : 71% des 2 900 employés concernés déclarent être moins sujets à l’épuisement professionnel (burn-out) et 39% moins stressés. Faire bénéficier ses collaborateurs d’une journée supplémentaire non travaillée leur permet de se maintenir en énergie haute et a des effets bénéfiques sur leur santé mentale et physique.
  3. 💤 Amélioration de la qualité du sommeil : Selon cette même expérience britannique, cette nouvelle organisation du travail aurait un impact positif sur la qualité du sommeil des salariés concernés puisque 40 % d’entre eux déclareraient mieux dormir. Quand on sait que le manque de sommeil est un des maux du siècle, que 77 % des Français déclarent mal dormir en 2023 et que 59 % des Français reconnaissent faire des erreurs à cause de la fatigue, le gain à en attendre est inestimable !
  4. 💕 Augmentation de la satisfaction au travail : Les salariés bénéficiant de la semaine de 4 jours affichent un niveau de satisfaction plus élevé concernant leur travail et cela se traduit, comme je le développerai dans le paragraphe suivant, par moins de démissions et de départs de leur part et par un engagement accru.
  5. 💰 Effet positif sur le pouvoir d’achat : En réduisant le nombre de jours travaillés par semaine, les salariés peuvent économiser sur les coûts associés au travail comme les frais de transport (essence, frais de stationnement…), les repas à l’extérieur ou bien encore les frais de garde des enfants.

Tout cela contribue à améliorer le bien-être individuel et collectif et la qualité de vie globale. Laurent de la Clergerie écrit d’ailleurs qu’il « ne parle plus d’une mesure qui améliore la QVT (qualité de vie au travail) ou la QVCT (qualité de vie et des conditions de travail), mais d’une mesure qui améliore la QV ou QVTC (qualité de vie tout court !), car les effets induits sont bien au-delà de la vie « au travail ». [2]

Avantages pour les entreprises

Maintenant que nous avons évoqué les avantages pour les collaborateurs, passons en revue les avantages pour les entreprises en partant du plus évident au moins évident voire inattendu :

  1. ✨ Effet positif sur la marque employeur et l’image de l’entreprise : Une entreprise qui a mis en place la semaine de 4 jours véhicule une image extrêmement positive d’elle-même que ce soit vis-à-vis de ses propres collaborateurs, des candidats, des clients potentiels ou bien encore de ses clients. Laurent de la Clergerie affirme ainsi qu’il est « assez fréquent d’entendre les félicitations de clients qui reconnaissent et saluent cette initiative « humaniste » et cette « évolution sociétale ». » [2]
  2. 🧲 Renforcement de l’attractivité et recrutements facilités : Il en découle naturellement un renforcement de l’attractivité de l’organisation ayant déployé la semaine de 4 jours. C’est indéniablement un critère d’attractivité différenciant pour attirer des candidats. Laurent de la Clergerie déclare que le Groupe LDLC ne rencontre aucune difficulté à recruter, y compris pour les métiers réputés les plus pénibles.
  3. 💍 Diminution du taux de turnover et meilleure rétention des collaborateurs : La semaine de 4 jours permet d’être attractif aussi bien auprès des personnes externes (candidats, clients) que des personnes internes (collaborateurs). Aussi, son déploiement s’accompagne d’une diminution significative du taux de turnover. Depuis que LDLC a adopté cette organisation, la structure a enregistré un très faible nombre de départs. Leur taux de turnover est passé de 10,4 % en 2019 à 2,3 % en 2021 !
  4. 🔎 Diminution de l’absentéisme et des accidents du travail : Dans la lignée logique de ces avantages, on retrouve également la diminution du taux de l’absentéisme. Laurent de la Clergerie a ainsi constaté que malgré les nombreux arrêts liés à l’épidémie de Covid-19, le taux d’absentéisme est passé de 6 % en 2019 à un peu plus de 5 % en 2021. Plus significatif, le Groupe LDLC a enregistré en 2019 « plus de 2 400 journées d’absence qui n’étaient dues ni à un arrêt maladie, ni à un accident du travail, ni à un congé maternité ou à un évènement familial. En 2021, ce chiffre est tombé à... zéro ! » [2]

    L’expérimentation britannique évoquée au paragraphe précédent a abouti à la même conclusion à savoir une chute de 65 % du nombre de jours d'arrêt maladie. Phénoménal ! Le nombre des accidents du travail baisserait également de manière conséquente avec une diminution de 50% pour LDLC.

    [Cela est valable dans le cas de la semaine de 4 jours avec réduction de la durée de travail hebdomadaire et non compression sur 4 jours avec le même volume d’heures travaillées chaque semaine. Dans le cas d’une compression, l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) met même en garde contre un risque de fatigue accrue. Des journées plus étendues et longues peuvent générer plus de fatigue et engendrer une possible réduction de la vigilance ainsi qu’une augmentation des risques d’accidents et des risques routiers (de mission ou de trajet)].
  5. 🤝 Renforcement de l’engagement des collaborateurs et de la cohésion d’équipe : Toutes les études existant à l’heure actuelle mettent en évidence un lien fort entre la mise en œuvre de la semaine de 4 jours et l’augmentation de l’engagement des collaborateurs. Ces derniers, heureux de bénéficier d’un repos hebdomadaire de 3 jours, se déclarent plus contents de venir travailler et plus investis. Ils sont plus engagés, plus proactifs et prennent à bras le corps les difficultés professionnelles qui se présentent à eux afin de trouver des solutions aux situations qui pourraient remettre en question ce nouveau rythme de travail.

    En revanche, pour les salariés qui n’aiment pas ou aiment très peu leur métier (manque d’intérêt et de motivation intrinsèques), il n’y aura pas d’effet miracle. Le fait de bénéficier d’un 3ème jour de repos par semaine ne les rendra pas plus engagés. Cela pourra même avoir un effet préjudiciable sur leur engagement. Un jour de repos supplémentaire pourra accentuer la dissociation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et pourra rendre encore plus difficile leur retour au travail après une pause plus longue.
  6. 💡 Surcroît de créativité et d’innovation : La semaine de 4 jours, permettant au cerveau de se reposer une journée de plus et aux collaborateurs de poursuivre des activités en dehors du travail, aboutit, comme nous l’avons vu, à une diminution de la fatigue et du stress favorisant ainsi un environnement mental propice à l’exploration d’idées nouvelles. La créativité et l’innovation, éléments indispensables et vitaux à toute organisation pour qu’elle se remette en question, qu’elle évolue et se démarque de la concurrence, en sortent ainsi renforcées.

    Laurent de la Clergerie confie ainsi qu’ils ont constaté avec son frère « un surcroît de créativité dans les semaines qui ont suivi le passage aux 4 jours. Plusieurs collaborateurs sont venus [les] trouver […] avec de nouvelles idées et propositions, ou tout simplement pour nous dire qu’ils avaient enfin réussi à résoudre le problème auquel ils étaient confrontés. » [2]
  7. 🧠 Réorganisation et optimisation des pratiques : Pour que la semaine de 4 jours avec diminution du volume d’heures hebdomadaires et, concomitamment, maintien du salaire devienne une réalité, cela implique une profonde réorganisation du travail et une remise à plat des pratiques. La transition vers la semaine de 4 jours est ainsi une opportunité rare et unique « d’oser remettre en cause les habitudes, de questionner les pratiques afin d’en identifier de nouvelles, qui soient davantage source de création de valeur et alignées avec ce nouveau rythme de travail » [2]

    L’écrasante majorité des expérimentations de la semaine de 4 jours démontre que les collaborateurs s’engagent avec force dans cette réorganisation afin d’instaurer un mode de fonctionnement plus efficient. Cela passe par l’optimisation des processus, l’automatisation de tâches répétitives, la réduction du nombre et de la durée des réunions, la mise en œuvre d’une communication plus transparente et d’un processus de feedback continu… Les organisations en ressortent avec une organisation repensée de manière plus efficiente !

    Cerise sur le gâteau, le fait de co-construire et d’associer les collaborateurs dans l’élaboration de nouvelles modalités de fonctionnement pour réaliser en 4 jours ce qui était fait en 5, les « incite à ne plus se considérer comme de simples exécutants mais comme de véritables acteurs du changement. » [5] Cela renforce leur autonomisation, leur responsabilisation et leur automotivation, recrée du lien et influe positivement sur leur sentiment de considération et de reconnaissance.
  8. 🎯Augmentation de la productivité et de la performance : Avec tous les avantages cités précédemment, il n’est guère étonnant que le dernier bénéfice soit l’augmentation de la productivité. Dans un rapport de 2019, l’équipe dirigeante de Microsoft au Japon a ainsi officiellement déclaré une augmentation de 40 % de la productivité suite au passage à la semaine de 4 jours.

    Si aucun chiffre n’est avancé par le PDG de LDLC, ce dernier ne s’attendait pas à une augmentation aussi conséquente que celle à laquelle il a assisté. Il n’a finalement pas eu besoin de recruter autant que prévu pour pallier la diminution du nombre d’heures hebdomadaires et ce même pour les emplois obéissant à des cadences de travail imposées. Il en a été le premier bluffé ! Voici les chiffres qu’il présente dans son livre pour illustrer la réussite de la semaine de 4 jours :

    « […] en 2019, nous étions 1 020 collaborateurs dans le groupe. Cette année-là, nous avons réalisé un chiffre d’affaires avoisinant 500 millions d’euros. Fin 2021, soit près d’un an après notre passage à la semaine de 4 jours et 32 heures, notre chiffre d’affaires s’élevait à près de 700 millions et le groupe comptait 1 060 collaborateurs. Autrement dit, notre CA a progressé de 40 % tandis que l’effectif, lui, a augmenté de moins de 4 %, et que le temps de travail a baissé de 8,6 %. » [2]

    Comment expliquer cette performance ? Difficile de répondre avec précision. « La réponse se trouve sans doute dans ce bien-être que […] nous ne pouvons pas quantifier, mais qui se traduit bel et bien par une hausse de la productivité. » [2]

    Son projet, a priori fou, de faire du bien-être le pilier de la performance collective s’est avéré gagnant sur toute la ligne et a largement dépassé ses attentes. Avant de conclure cet article, je vous propose d’évoquer brièvement les avantages de la semaine de 4 jours pour la société même.

Avantages pour la Société

  1. 🌳 Bienfaits pour l’environnement : Le déploiement à grande échelle de la semaine de 4 jours, est, assez logiquement, bénéfique pour l’environnement. C’est ce qui ressort de toutes les études sur le sujet. Si la majorité des salariés français adoptait cette nouvelle forme d’organisation,  il y aurait, logiquement, moins de déplacements et donc moins d’embouteillages et de pollution.

    Selon une étude anglaise de 2021, passer à la semaine de 4 jours permettrait ainsi de réduire l’empreinte carbone annuelle du Royaume-Uni de 127 millions de tonnes d’ici 2025, soit une diminution de 21,3 % ce qui est loin d’être négligeable.
  2. 🚨Apprendre à ralentir ! : Laurent de la Clergerie insiste à plusieurs reprises et à juste titre sur ce point dans son ouvrage. Adopter la semaine de 4 jours permet de réapprendre que rien n’est urgent ou presque ! De nos jours, tout semble urgent, en permanence, et une réponse est toujours attendue dans les plus brefs délais. Basculer à la semaine de 4 jours démontre – si cela était nécessaire – que « tout n’est pas urgent, que l’entreprise ne va pas s’écrouler sous prétexte que l’on ne répond pas toujours dans la minute et qu’une réponse peut souvent attendre 24 heures, voir 48 heures si les jours off des personnes concernées par l’échange mail s’enchaînent. Cela fait aussi probablement gagner beaucoup de temps parce qu’on réapprend à ne plus regarder ses mails toutes les 5 minutes et à couper constamment le travail en cours de cette façon. » [2]
  3. 💶 Effets positifs sur l’équilibre financier de notre système d’assurance maladie : Avec la chute du nombre de jours d’arrêt maladie, la baisse du nombre d’accidents de travail, la diminution de la consommation de médicaments utilisés pour lutter contre le stress, la fatigue ou bien encore les troubles du sommeil, les finances de l’assurance maladie devraient se porter nettement mieux.
  4. 🟰 Favorisation de l’égalité femmes-hommes : Si ce n’est pas son objectif premier, la semaine de 4 jours favorise, dans les faits, l’égalité hommes-femmes. La notion de travail à 80 % disparaît et la possibilité d’avoir son mercredi de libre et ce sans perte de salaire change véritablement la donne.

    Les femmes n’ont ainsi plus besoin de demander un temps partiel, avec les inconvénients que l’on connaît en termes de salaire, de cotisations sociales ou bien encore d’avancement de carrière.

Les principaux inconvénients / risques

Certains diront que j’ai dressé un tableau idyllique de la semaine de 4 jours.

Son déploiement n’est, cependant, pas une mince affaire, loin de là, et des inconvénients existent également, tout particulièrement, dans le cas d’une semaine de 4 jours avec un temps global de travail sur la semaine inchangé et donc compressé sur 4 jours versus 5 jours.

  • Parmi les principaux risques, le premier risque est, sans conteste, celui d’une surcharge mentale ou physique du fait de l’allongement de la durée de travail quotidienne, notamment pour les entreprises qui ne réduisent pas la durée hebdomadaire du temps de travail ruinant ainsi potentiellement les gains escomptés en matière d’équilibre vie personnelle et professionnelle.
  • Le deuxième risque, intimement lié, concerne les salariés qui ont une charge familiale. L’augmentation, mal calibrée, de la durée quotidienne du travail peut rendre plus difficile la coordination de leurs horaires de travail avec les horaires scolaires ou les besoins de leurs enfants et peut nécessiter une réévaluation des arrangements de garde d'enfants.

Ces risques soulignent à quel point il est important, pour chaque entreprise, de ne pas foncer tête baissée en procédant à un copier/coller des pratiques mises en œuvre par d’autres mais de prendre le temps nécessaire pour réfléchir aux conditions de déploiement et d’appropriation de la semaine de 4 jours au regard de ses spécificités, de son métier, de sa culture, de ses collaborateurs et de leurs attentes, de sa localisation...

De nombreux chemins existent pour permettre aux salariés de bénéficier de 47 jours de repos supplémentaires par an sans perte de salaire et ce pour une grande majorité des organisations. S’il n’est pas possible à ce stade d’affirmer que la semaine de 4 jours peut être applicable à tous les secteurs d’activité, la plupart des études estiment, en effet, qu’elle peut être adoptée par plus de 80 % des entreprises.

Conclusion

Il faut dire que ses avantages sont nombreux et ce aussi bien pour les collaborateurs que pour les entreprises ou bien encore pour la société au sens large comme j’espère l’avoir démontré dans cet article.

Pour ma part, je suis une convaincue de la première heure et j’estime que, plus qu’un simple effet de mode,  nous assistons, tout simplement, aux prémices d’un nouveau « contrat social » plus en phase avec les attentes des collaborateurs et avec le nouveau rapport des Français au travail.

« Pour qu’elle soit féconde et durable, l’appropriation de la semaine de 4 jours nécessite de s’émanciper de nombreux paradigmes managériaux (référence horaire, conformisme aux règles, centralisation du pouvoir...) pour en épouser, pas à pas, de nouveaux (autonomie, pilotage par les résultats, coconstruction...), afin de parvenir à ce juste équilibre entre nombre de jours consacrés au travail et à la vie que ce travail nourrit. » [5]

Pour ce faire, cette démarche doit impérativement reposer et s’appuyer sur la confiance : confiance en ses équipes, confiance dans leur capacité à optimiser leurs modes de fonctionnement et confiance dans leur capacité à s’adapter. C’est la condition sine qua non.

Références

[1] Enquête Ifop pour la Fondation Jean Jaurès de janvier 2023 | jean-jaures.org/publication/je-taime-moi-non-plus-les-ambivalences-du-nouveau-rapport-au-travail/?post_id=41656&export_pdf=1

[2] Livre « Osez la semaine de 4 jours » de Laurent de la Clergerie paru en mars 2023 | éditions Bookelis

[3] Il y a des cas où le salaire a été baissé en contrepartie du passage aux 4 jours comme Desigual en Espagne avec une baisse de salaire de 6,5 % mais c’était au démarrage du phénomène des 4 jours. Aujourd’hui,  la définition a évolué et tend vers 4 jours sans baisse de salaire. https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/les-employes-du-siege-de-desigual-adoptent-la-semaine-de-4-jours-avec-une-baisse-de-salaire-de-6-5_AN-202110120031.html

[4] Sondage mené par l’institut YouGov pour le HuffPost mai 2023

[5] Livre « La semaine de 4 jours, sans perte de salaire, ça marche ! : Une révolution du rapport au travail pour réconcilier épanouissement et productivité » de Francis Boyer |éditions Eyrolles

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À propos de l'auteur·e
Marie-Sophie Zambeaux
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Fondatrice @ReThink RH, éditorialiste RH, host du podcast "Histoires de Recruteurs".