Je suis recruteuse de Techs, sans être une Tech. Et tout va bien

En décembre de cette année, cela fera 5 ans que je suis recruteuse dans la Tech. 

Et comme pour beaucoup de mes collègues aujourd’hui je ne suis pas issue à l’origine de ce milieu et j’ai encore moins suivi un parcours lisse et bien calibré qui m’aurait permis d’être une sommité dans ce domaine. 

Et je n’ai absolument aucun regret à ce sujet. 

Moi j’ai «appris sur le tas» comme on dit dans notre culture populaire. 

Je suis arrivée dans un milieu dont je connaissais en partie la surface mais pas la profondeur. Je n’ai pas de honte à l’avouer parce que c’était une vérité à l’instant T. 

Je voyais bien ce que faisait un développeur dans l’absolu mais pas vraiment quels étaient les outils nécessaires à l’exécution de ses tâches quotidiennes.

Alors, J’ai sorti ma pelle et mon râteau et j’ai creusé pour mieux comprendre ce à quoi j’allais être confrontée. 

Et comme j’ai commencé ma carrière dans un centre de formation dédié à la reconversion professionnelle aux métiers de l’informatique, on peut dire que j’étais au bon endroit au bon moment . 

Aujourd’hui je me vois encore totalement comme une exploratrice qui découvre un iceberg et qui cherche à comprendre toute la complexité de sa partie immergée et c’est totalement exaltant car infini.

Très sincèrement je trouve mon parcours honorable parce qu’il met en lumière quelque chose qui me semble primordial dans mon métier : la curiosité 

Quel que soit le domaine dans lequel on exerce son métier aujourd’hui, la curiosité reste le fil conducteur qui permet de monter en compétences vite et bien. 

Certains diront que rien ne vaut un apprentissage académique et je répondrais à cela que la vie professionnelle ne permet pas de pouvoir passer par ce système automatiquement. 

Je pourrais citer de nombreux exemples de ma propre carrière pour illustrer mon propos mais j’ai plutôt envie de rendre hommage à toutes ces personnes qui m’entourent et qui ont nourri ma curiosité au point de me permettre d’acquérir un socle solide de connaissances techniques. 

On apprend toujours plus vite et plus fort bien entouré, ce n’est pas un adage connu mais ça devrait le devenir tellement il se vérifie dans la vie quotidienne.

Et pourtant malgré les années qui passent, les centaines d’échanges, les rencontres avec des techniques et le travail personnel mis au service de mon corps de métier, je suis encore confrontée régulièrement à des personnes qui pensent que je n’y connais rien à la Tech et que je ne suis pas légitime à exercer mon métier. 

Et je ne suis pas la seule à subir ce jugement hâtif au sein de mes pairs.

La voilà, la fameuse question de la légitimité, elle ressort tout le temps, notamment concernant les personnes comme moi qui ont eu plusieurs parcours professionnels au cours de leur vie.

Dans notre société nous avons du mal à nous détacher du fait que la légitimité professionnelle doit forcément venir d’un apprentissage certifiant. 

Alors qu’en vérité la légitimité vient le plus souvent de la mise en situation dans un environnement donné avec ses codes et ses contraintes. 

Je me suis toujours demandé pourquoi on essayait de mesurer à tout prix une notion plutôt philosophique ? 

Y a-t-il un comité de la légitimité qui se cache quelque part et qui est fiable à 1000 % ?

Et bien non évidemment et fort heureusement au demeurant. 

Cela étant, si je voulais être très précise, je dirais qu’on a surtout tendance à tout confondre de nos jours. 

Parce qu’ici il ne s’agit pas du tout de légitimité mais plutôt de bien définir un périmètre d’expertise professionnel.

Et si je décortique le sujet: le périmètre d’expertise de mon métier de recruteuse ne tourne en aucun cas autour de mes connaissances techniques liées à la Tech mais bien autour de ma capacité à recruter les bons profils et à bien les accompagner. 

La nuance vous semble floue ? Elle est pourtant très claire si on regarde de plus près. 

J’aimerais bien éclaircir ce point avec vous et essayer de rassembler les deux camps qui s’affrontent régulièrement sur le sujet. 

Doit-on forcément être un expert technique dans son domaine d’activité pour être un bon recruteur ? 

Posons-nous les bonnes questions une bonne fois pour toutes pour mettre fin à des croyances limitantes 

Je vais prendre mon métier comme base de réflexion car c’est celui que je connais le mieux aujourd’hui mais la démarche analytique s’applique à tous les secteurs. 

👉 Les recruteurs dans la Tech ne sont pas des développeurs et ne le seront jamais sauf rares exceptions. À l’heure actuelle je connais une seule personne qui l’a fait dans ce sens-là. 

Alors ça semble évident dit comme ça, mais ça ne l’est pas toujours pour tout le monde. 

Laissons à chacun son domaine d’expertise car ici, il s’agit encore d’expertise. 

Le monde s’en porte toujours mieux ainsi. 

👉 Je ne sais pas coder ni lire du code et c’est toujours normal car ce n’est toujours pas mon domaine d’expertise pour ceux et celles qui en douteraient encore.

Mon métier, celui pour lequel j’ai été embauchée au tout commencement, c'est le recrutement pas du tout le développement. 

Par contre grâce à mon CTO et à ma curiosité, aujourd’hui je comprends bien les architectures de projets et comment s’articulent les technos et les frameworks. 

Grâce aux commerciaux de mon équipe j’ai une bonne connaissance des différents corps de métiers Tech et des attentes des clients selon les postes proposés en mission. 

Connaissances renforcées grâce à un travail personnel et collaboratif avec des équipes techniques et d’autres recruteurs. 

Et ça c’est au top car ça fait partie de ce que couvre l’expertise de mon métier, à savoir travailler en collaboration avec les différents acteurs de mon entreprise pour mieux recruter. 

Alors je pose tout haut la question qui brûle les lèvres de tout un chacun : 

Est-ce que j’aurais pu être tout aussi performante dans mon métier sans avoir développé tout cela ? 

Oui bien sûr sans aucun doute et je n'ai pas peur de l’affirmer bien fort !

Cassons les fausses croyances !

On n’a pas besoin de devenir expert d’un secteur d’activité pour être excellent dans le recrutement. 

Oui c’est un plus d’avoir un vernis solide, c’est indéniable je ne dirais pas le contraire ici, mais ça reste juste un plus et non pas une nécessité absolue. 

Car au final pour revenir à mon secteur, ce n’est pas moi qui juge les compétences techniques des gens que je recrute et ce ne sera jamais moi, mais bien un expert technique au travers d’un test technique. 

Moi je détermine, des potentiels, des aptitudes, des complémentarités, des caractères qui s’accorderont avec nos équipes, des savoir-faire et des savoir-être.

Je n’ai donc pas besoin de me transformer en développeuse pour bien recruter des développeurs, c’est une pensée simpliste qui ne fait pas du tout avancer les choses. 

Comme je vous l’ai dit plus haut, chacun son métier, laissons faire ceux qui savent faire et ne cherchons pas à tout mélanger.

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D’ailleurs pour illustrer mon propos,
Si demain je change totalement de secteur et que je recrute dans l’agriculture par exemple, je n’aurais pas de grandes connaissances spécifiques au début mais je saurais toujours bien recruter grâce à l’expertise que j’ai acquise tout au long de l’exercice de mon métier de recruteuse.

Je n'aurais donc pas besoin d’aller moissonner un champ ni d’aller faire les vendanges pour asseoir ma légitimité. 

Ma force sera plutôt de m’acculturer encore une fois auprès des spécialistes qui m’entourent et dont c’est le métier. 

Il est possible que les motivations qui animent les plus sceptiques à croire que les recruteurs manquent de légitimité parce qu’ils ne sont pas des experts de leurs domaines d’activité soient tout simplement une méconnaissance du métier de recruteur et de ses enjeux.

Dans ce cas, nous sommes nombreux et nombreuses à être partants pour mieux expliquer notre métier au plus grand nombre et de façon plus visible, Il suffit de demander et ce sera avec plaisir.