Aujourd’hui, j’ai choisi de braquer les projecteurs sur Permis de recruter, écrit par Élise Moron et Léo Bernard, le guide ultime pour identifier, attirer, convaincre et évaluer les candidats [1] Dès la préface rédigée par Jérémy Clédat, le cofondateur de Welcome to the Jungle, le ton est donné avec une question percutante : « Et si on traitait enfin nos candidats comme des clients ? » Ce constat est suivi d’une observation universelle : « Recruter tout comme être recruté est souvent une expérience décevante. »
Les auteurs enfoncent le clou avec cette vérité implacable : « Les candidats n’aiment pas être candidats ! » Mais rassurez-vous, cela n’est pas une fatalité. Ce guide, qui se veut méthodique et inspirant, offre des outils concrets et des astuces percutantes pour transformer l’expérience candidat en véritable atout stratégique.
Dans cet article, je vous emmène donc explorer comment soigner l’expérience candidat et ce à chaque étape, un des nombreux thèmes abordés par le livre, qui traite l’ensemble du processus de recrutement de A à Z. Petit tour d’horizon des meilleures pratiques et idées inspirantes à leur piquer !
💓 L’expérience candidat : des ressentis au service du recrutement
Pour commencer, définissons ce qu’est l’expérience candidat. Les auteurs la décrivent comme « l’ensemble des ressentis et des émotions d’une personne dans le cadre d’un processus de recrutement. »
Pour ma part, j’aime citer Maya Angelou pour illustrer cette notion : « Les gens oublieront ce que vous avez dit, ils oublieront ce que vous avez fait, mais n'oublieront jamais ce que vous leur avez fait ressentir. » L’expérience candidat, c’est donc bien plus qu’une suite d’étapes administratives : c’est un levier émotionnel qu’il convient de soigner à chaque interaction.
Mais pourquoi est-ce primordial ? Voici les principaux bénéfices identifiés dans le livre :
- Attirer les profils pénuriques : « À salaire égal et missions égales, une candidate choisit l’entreprise qui lui a procuré la meilleure expérience de A à Z. »
- Créer des ambassadeurs de votre marque : Une expérience positive incite les candidats, même non retenus, à parler positivement de votre entreprise. C’est ce qu’a fait Élise Moron dans un post LinkedIn suite à son expérience chez Alan, qu’elle recommande… alors qu’elle n’a pas été retenue.
- Construire un vivier activable : Les candidats non recrutés aujourd’hui pourraient devenir vos talents de demain à condition, bien sûr, d’entretenir la relation.
- Éviter les bad buzz : Comme le rappellent les auteurs, « Les candidats et les clients sont les mêmes personnes dans la vraie vie. » Négliger les premiers peut nuire à votre image publique.
- Réduire les pertes financières : Une mauvaise expérience candidat peut coûter cher en réputation comme en opportunités business.
🏗️ Avant même de postuler : poser les bases d’une expérience engageante
Les premiers points de contact sont déterminants. Une annonce vague, un site carrière surchargé ou un processus trop long peuvent faire fuir les candidats dès la ligne de départ. Les auteurs insistent sur le fait de faire simple et rassurant dès l’annonce.
Le candidat ne doit pas avoir l’impression de participer à un épisode de Koh-Lanta version recrutement !
📍 Les pratiques conseillées :
- Soignez vos annonces : Elles doivent être transparentes et inclusives, mentionnant des informations essentielles comme le salaire, les conditions de télétravail ou encore le déroulement du processus. « Stop aux salaires conceptuels et aux processus flous, » ajoutent les auteurs. Donnez un maximum d’informations : le nombre d’étapes, leur format, leur durée, les interlocuteurs pour chaque étape, la durée globale du processus, et même, en bonus, les objectifs de chaque étape accompagnés de conseils pour bien s’y préparer.
- Travaillez votre site carrière : Comme le dit Léo Bernard, « il ne s’agit pas d’avoir un site hors de prix avec du motion design, des dragons qui crachent des flammes et des vidéos payées 100 000 euros parce que c’est cool et stylé. » Ce qui compte ce sont des témoignages authentiques, des engagements concrets (diversité, RSE) et des exemples de progression interne. Une page Notion bien ficelée peut suffire !
🫱🏼🫲🏼 Pendant le processus : transformer le stress en expérience humaine
Les entretiens marquent souvent le cœur de l’expérience candidat. Ici, il est capital de miser sur des méthodes d’évaluation scientifiquement validées comme les entretiens structurés, les mises en situation ou les tests techniques. Les questions pièges, en revanche, sont contre-productives et délétères pour l’expérience candidat.
Une fois la candidature envoyée, chaque interaction devient une opportunité de rassurer et fidéliser.
« Mettez-vous dans les baskets du candidat, » rappellent Elise Moron et Léo Bernard. Cela passe par une attitude respectueuse mais aussi par des outils comme les nudges.
📍 Leurs idées inspirantes :
- Testez les nudges : Inspirés du marketing, ces « petits coups de coude » sont conçus pour maintenir l’engagement des candidats tout au long du processus de recrutement. L’idée ? Créer des interactions simples mais stratégiques à chaque étape clé, là où le candidat pourrait se démotiver ou abandonner.
Comment mettre en œuvre concrètement des nudges ?
- Identifiez les moments critiques : Ces points sensibles du processus sont souvent ceux où le candidat est en attente d’une réponse ou entre deux entretiens (après un appel de préqualification, une rencontre avec le manager ou l’équipe). Ce sont des moments où l’intérêt peut s’étioler s’ils ne sont pas accompagnés d’une communication proactive.
- Appliquez des actions adaptées :
- Après l’appel de préqualification : Envoyez un email récapitulatif qui détaille les prochaines étapes, leur durée, et donne des conseils pour réussir.
- Avant un entretien : Partagez une courte vidéo du futur manager ou de l’équipe pour donner un aperçu des valeurs de l’entreprise et rassurer le candidat.
- Entre deux étapes : Proposez un kit candidat contenant des informations sur la culture de l’entreprise, des astuces pour les entretiens ou une présentation des projets en cours.
- Soyez créatif mais pertinent car les nudges peuvent prendre plusieurs formes :
- Emails personnalisés : Comme en e-commerce, un message du type « Nous avons hâte de vous retrouver pour la prochaine étape. Voici quelques conseils pour vous préparer. » peut être très motivant.
- SMS de suivi : Un message court et encourageant peut faire toute la différence.
- Contenus engageants : Une infographie, une vidéo ou un message vocal peuvent renforcer l’engagement tout en restant informatifs.
Pourquoi ces petits gestes fonctionnent ? Ces nudges, simples à mettre en œuvre, montrent aux candidats qu’ils sont valorisés et leur permettent de rester connectés émotionnellement au processus. Ils transforment les moments d’attente en opportunités pour renforcer l’engagement et réduire le risque d’abandon.
Comme l’écrivent Léo et Elise « Un candidat, c’est comme un Tamagotchi. Il faut lui donner à manger (des infos et des feedbacks constructifs) pour qu’il reste en vie (et dans le process). Sinon, il meurt (ou pire, il part à la concurrence). »
🎈 La proposition d’embauche : marquer les esprits
Le moment de la proposition d’embauche est clé pour conclure en beauté et transformer une expérience positive en souvenir mémorable. Les gestes originaux, qui créent une connexion émotionnelle, permettent de marquer durablement les candidats et sans forcément coûter très cher.
📍 Leurs idées inspirantes :
- Evitez l’email bateau : Il n’y a rien de plus décevant pour un candidat que de recevoir une offre d’embauche rédigée de manière impersonnelle et froide. Vous savez, ces emails remplis de bullet points énumérant la mutuelle, l’indemnisation des transports, et une phrase finale du type : « Cette offre est valable 15 jours. » Ce genre de message, bien que factuel, casse la magie et réduit l’expérience à un simple copier-coller administratif.
Pour convaincre et closer efficacement, il est essentiel de maintenir l’élan émotionnel jusqu’au bout. Une proposition d’embauche devrait être un moment unique, chaleureux, et mémorable pour le candidat. Cela ne signifie pas forcément déployer des moyens coûteux, mais bien miser sur une approche personnalisée et authentique.
Prenez exemple sur un email plus créatif et humain comme celui-ci proposé dans Permis de Recruter :
" Bonjour XX,
On est vraiment à deux doigts de vous faire une proposition. Mais changer de travail et rejoindre une nouvelle entité avec un nouveau quotidien, de nouveaux collègues, c'est un engagement très important qui peut faire peur alors sachez qu'on souhaite vous exprimer nos vœux avant.
On vous promet d'être là dans les bons comme dans les mauvais moments. [XXX]
Et sans plus attendre on souhaite vous faire notre demande (on avait prévu les fleurs et les mariachi mais on s'est dit que c'était peut-être un peu trop).
Souhaitez-vous nous rejoindre pour faire un bout de chemin ensemble ? ”
- Intégrez VideoAsk dans vos pratiques : Cet outil, souvent utilisé par les équipes marketing et commerciales, mérite davantage de place dans le recrutement. Elise Moron le recommande chaudement pour humaniser le nurturing des candidats à toutes les étapes, avec un impact encore plus fort lors de la proposition d’embauche. Une vidéo personnalisée où le futur manager félicite chaleureusement le candidat peut transformer une simple offre en un moment mémorable.
📍 Leurs idées extra-ordinaires :
- Le ballon à hélium : Imaginez recevoir un colis et, à l’ouverture, un ballon à hélium s’élève doucement, portant avec lui un QR code. Ce dernier mène à une vidéo personnalisée où le recruteur ou le futur manager vous félicite chaleureusement. Élise explique l’évolution de cette idée : « Sur le fil du ballon était attaché un petit message. Au début, c’était un message écrit, mais je me suis vite rendu compte que le pouvoir d’une vidéo en termes d’émotion est bien plus grand. » Elle a donc opté pour un QR code menant à une vidéo de trente secondes face caméra, où elle félicitait le candidat avec « un supplément de sourires, de bonne humeur et d’énergie. » Ce type de geste crée une émotion unique et rend la proposition d’embauche difficile à oublier.
- Le puzzle message : Cette autre idée marquante consiste à envoyer au candidat un petit sachet intriguant avec l’inscription : « J’ai un message pour toi. » Curieux, le candidat ouvre le paquet pour découvrir un puzzle à assembler. Élise décrit le déroulé avec enthousiasme : « Cinq minutes trente plus tard, il comprend que vous lui faites une offre d’emploi. Touché par ce format original, il aura certainement davantage envie d’accepter votre offre, plutôt que celle reçue le matin même d’un concurrent sous la forme d’un e-mail RH lapidaire et impersonnel. » Ce format ludique valorise l’attention portée au candidat et montre qu’il est considéré comme unique.
🫶 Et après ? Bâtir une relation durable
Une fois l’offre acceptée, l’expérience candidat doit naturellement évoluer en une expérience collaborateur tout aussi fluide et soignée. Assurez un onboarding complet à savoir métier, administratif, social et culturel.
📍 Leurs idées inspirantes :
- Envoyez un message vidéo du futur manager lors de la phase de préboarding.
- Misez sur des formats innovants comme des journées “Vis ma vie ”ou des visites terrain
♻️ Et les candidats non retenus ? Soignez votre vivier
Les candidats non retenus représentent une richesse souvent sous-estimée. Plutôt que de les oublier, pourquoi ne pas les intégrer dans une stratégie réfléchie pour maintenir le lien et valoriser votre vivier ?
📍 Leurs idées inspirantes :
- Créez une newsletter segmentée : Prenez exemple sur Foodle, qui a mis en place une newsletter à forte valeur ajoutée pour ses candidats non retenus. Voici comment ils s’y prennent :
- Segmentation : Ils segmentent leur vivier par métiers (développeurs, commerciaux, ingénieurs, etc.), ce qui leur permet de partager un contenu pertinent et adapté aux centres d’intérêt de chaque groupe.
- Contenus enrichissants : Plutôt que de parler directement de leurs postes à pourvoir, ils proposent des articles de veille métier, des tendances du secteur ou des conseils de carrière. Ils terminent chaque newsletter par une mention discrète : « Si vous cherchez votre prochaine aventure, pensez à nous. Voici nos opportunités en cours. »
- Résultats probants : Avec un taux d’ouverture moyen de 63 % et seulement 4 % de désabonnements par mois, cette newsletter est un outil redoutable. Depuis sa mise en place, elle a permis de recruter 148 candidats avec un taux de conversion de 5,3 %.
Le secret de leur réussite ? Une approche généreuse et régulière qui valorise leurs candidats et entretient la relation sur le long terme.
- Recourez au CNPS (Candidate Net Promoter Score) : Cet indicateur, directement inspiré du marketing, vous permet d’évaluer la satisfaction de vos candidats et d’identifier les points à améliorer. Voici comment il fonctionne :
- Posez deux questions clés :
- « Dans quelle mesure recommanderiez-vous à un ami de postuler chez nous ? » (sur une échelle de 0 à 10).
- « Pourquoi cette note ? »
- Analyser la data pour mettre en place des actions correctives. Il est important d’avoir une photographie à un instant T du CNPS moyen de chaque étape du process, mais il est encore plus important de suivre l’évolution du CNPS dans le temps. L’idée est d’analyser dans quelle mesure il descend drastiquement à telle ou telle étape pour identifier la problématique et venir corriger le tir.
- Posez deux questions clés :
Cerise sur le gâteau, comme expliqué dans le livre par Matthieu Penet, le CEO de Yaggo, le simple fait de demander leur avis envoie un message fort sur le respect accordé aux candidats. Second effet kiss cool, « donner un lieu d’expression libre évite de voir les frustrations se déverser sur les réseaux sociaux. »
Conclusion
Dans Permis de recruter, Léo Bernard et Élise Moron démontrent que l’expérience candidat n’est pas un luxe mais une nécessité stratégique. Avec des outils, des idées audacieuses et une bonne dose d’empathie, chaque recruteur peut transformer ses candidats en ambassadeurs et ses recrutements en succès.
Alors, prêt à devenir un aimant à talents ? Prêt à passer à l’action ? Pour ce faire, la lecture de Permis de recruter s’impose !
Références
[1] « Permis de Recruter » de Léo Bernard et Elise Moron aux éditions Eyrolles