Le burn-out : étapes de préparation, définition et prévention

Loubna Benabderrazzak
Le burn-out : étapes de préparation, définition et prévention

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“J’ai fait un burn-out.”

Lorsqu’une personne évoque son burn-out, pour certains c’est parlant et pour d’autres c’est confus. Il peut même paraître inconcevable de s’épuiser au travail. Beaucoup arrivent à éteindre l’interrupteur quand ça devient trop éreintant. Ou, une fois le pied en dehors du bureau, on fait peau neuve.

Mais, plus souvent qu’on ne le pense, il existe des individus pour qui le travail est le sens d’une vie tout entière, pour qui la charge de travail est trop élevée, pour qui l’engagement est total ou encore, pour qui perfectionnisme et reconnaissance sont les mots d’ordre. À tel point, que ça peut faire très mal quand ils s’aperçoivent de la réalité.

C’est même 34% des salariés français soit près de 2,5 millions de personnes, qui ont connu un burn-out !

Nous pouvons avoir des prédispositions personnelles qui nous rendent plus sensibles au burn-out, mais il serait irréfléchi de croire qu’on y est imperméable. Tout le monde peut en avoir. Et ça tombe bien, je vous en parle aujourd’hui pour que chacun puisse retirer ce sentiment d’invincibilité. 😉

Qu’est-ce qu’un burn-out ?

Il existe énormément d’articles sur le burn-out, aussi appelé épuisement professionnel. Alors quand Silvia m’a proposé de parler de ce sujet, je me suis demandé ce que je pourrais apporter de plus. Ici, vous trouverez : un peu d’une psychologue recruteuse, un peu d’humour, un peu d’Histoire et d’histoire, et un peu beaucoup de prévention. C’est parti !

Pour commencer, qu’est-ce qu’un burn-out ? Selon Freudenberger, précurseur et créateur du terme dans les années 1980, le burn-out c’est ça :

Image métaphorique du burnout

Plus précisément, "sous la tension produite par la vie dans notre monde complexe, [les] ressources internes [d’une personne en burn-out] en viennent à se consommer comme sous l'action des flammes, ne laissant qu'un vide immense à l'intérieur, même si l'enveloppe externe semble plus ou moins intacte”.

Très parlant, vous ne trouvez pas ? Bien sûr, depuis, on a travaillé un peu plus sur la définition histoire d’avoir un peu moins de philo et plus de sens. 😂

Les travaux de Maslach sont une référence en la matière. Elle aborde notamment “l’écartèlement entre ce que les gens sont et ce qu’ils doivent faire”. Autrement dit, moi avec mes valeurs, mes idées, mon esprit et ma soif d’envie, je me retrouve au travail face à une désillusion. Une désillusion qui provoque une situation de stress intense et chronique en moi. Et si ça ne se calme pas, je finis par craquer : voilà un burn-out.

C’est donc “un état d’épuisement professionnel (à la fois émotionnel, physique et psychique) ressenti face à des situations de travail « émotionnellement » exigeantes”.

D’ailleurs, on remarque que l’émotionnel a une place omniprésente dans les définitions sur le burn-out. Parfois un peu trop. Car s’il n’était qu’une question d’émotions (tel qu’on l’entend dans les croyances populaires), ce serait plus simple. Mais, placer les émotions au centre du champ lexical du burn-out c’est laisser penser que cela dépend de la personne elle-même : “ton burn-out, c’est parce que tu ne tiens pas le stress c’est tout”. Vous auriez envie de jeter des tomates pourries sur la tête de quelqu’un qui ose prononcer ces mots, n’est ce pas ? Même si c’est votre maman ! En réalité, le burn-out c’est une part de vous, certes, et une grande part de responsabilité de votre environnement de travail.

Mais gardez vos tomates, je vais vous montrer comment faire un burn-out au four inratable. 👩‍🍳

Les étapes de préparation du burn-out

Comme un plat mijoté, le burn-out n’apparaît pas d’un coup. Tout est une question de temporalité et d’ingrédients. Pour un burn-out, il vous faut :

1ère étape : L’enthousiasme

Préparez une pâte bien enthousiaste. Pour cela, dans un saladier, mélangez :

  • Un haut niveau d’énergie et de dynamisme (500g)
  • Une ambition, des attentes et des objectifs élevés (300g)
  • L’acceptation d’une surcharge de travail exigeante (300g)
  • Une persévérance sans faille avec un sentiment de satisfaction (500g)

Pétrir l’ensemble jusqu’à atteindre le pic du plaisir et de l’enthousiasme. Laissez reposer.

2ème étape : Le surinvestissement (ou le surmenage)

Préparez la garniture du surmenage. Pour cela, deux options :

Soit vous atteignez la limite :

  • Une garniture de stress chronique : dans une poêle, mélangez une charge de travail importante, où l’on vous demande toujours plus, sans satisfaction, qui prend toute votre énergie, sans reconnaissance ni aucune perspective d’avenir dans votre carrière.

Soit vous vous acharnez :

  • Une garniture de workaholisme : Pour faire cette préparation, il vous faut 10 à 12h par jour voire les soirs et les week-ends non stop. Surtout, ne déconnectez jamais. Boulot Boulot Boulot. Refusez que l’on réduise votre charge de travail et fixez-vous plus d’objectifs, ou acceptez les objectifs ambitieux de votre chef cuisiner.

3ème étape : La désillusion

Pour une cuisson parfaite, le four doit être à chaleur max et temps max. C’est le moment de mettre l’ensemble dedans.

Votre pâte va se rendre compte de la chaleur et du temps qui continue d’avancer sans changement. Elle va être fatiguée, déçue. Il faut qu’elle perde espoir, on la voit dorer sur le dessus avec des signes cliniques : impatience, irritabilité, cynisme, isolement, troubles somatiques.

4ème étape : L’effondrement

Dring ! On sort du four.

Parfait ! Votre garniture est brûlée et a consommé toutes ses reserves. La pâte a complètement craquée et il n’y a plus aucun intérêt pour la vie professionnelle.

La recette du burnout

Voilà, nous venons de réaliser un burn-out ensemble.

Si je compare le burn-out a une recette de cuisine, c’est parce que je veux que vous compreniez que le burn-out est un processus. À chacune de ces étapes, l’épuisement, la négativité ou le manque de performance aurait pu être décelé mais sans sensibilisation et connaissance du phénomène, la recette se poursuit jusqu’à sa sortie du four.

Attention également à ne pas faire de raccourcis : une personne workaholic ou une personne avec une forte charge de travail ne va pas forcément faire un burnout. C’est le cumul de plusieurs éléments et la succession des événements (chronicité) qui peut induire un burn-out. N’oublions pas que le burn-out est prononcé lorsque l’employé ressent un épuisement émotionnel, est négatif ou cynique au travail et lorsqu’il est moins performant.

Vous pourriez aussi me dire : pourquoi la personne elle-même ne stoppe pas la recette ?

Parce que les mécanismes de défenses propres à l’humain dépendent de chacun. Parmi eux on retrouve : le déni, le refus, le refoulement, la minimisation, etc. La personne n’écoute pas les signes avants coureurs tel que son corps qui crie à l’aide ou ses proches qui trouvent la situation étrange, parce qu’elle veut réussir et elle ne veut pas s’avouer vaincu. Sauf que lorsque ça arrive, la personne rentre dans le stade de la désillusion qui est parfois difficile à accepter : “comment ai-je pu en arriver là” ? Puis elle tombe malade.

Mais au fait, est-ce qu’on parle vraiment de maladie ?

Est-ce que le burn-out est une maladie mentale à part entière ?

En psychologie, les maladies mentales sont catégorisées dans le DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) et le CIM (Classification internationale des maladies). Contrairement à ce que l’on peut penser, le burn-out ne fait pas partie de ces classifications.

Plus précisément, il y est mentionné comme un ensemble syndromique et non une maladie : celui de l’épuisement professionnel. La différence est importante car elle me permet de prendre du recul pour vous expliquer une chose essentielle : le burn-out n’est pas inhérent à vous précisément. Il n’est pas une maladie qui arrive d’un coup, que vous devez combattre seul et dont la cause serait uniquement votre rapport au travail. Les causes sont souvent liées à un contexte global de travail qu’on ne peut pas prédire personnellement et qui est de l’ordre de l’environnement de travail tout entier.

Et non, vous n’avez pas été trop faible ou trop fragile face à une situation difficile !

Par contre, le burn-out peut conduire à une dépression, qui elle, est une maladie mentale. Sortant de la sphère professionnelle, la perte de sens majeure au travail vient prendre le dessus sur la vie personnelle également. Toute votre vie perd son sens.

Nous avons évoquer comment un burn-out survient, ce qu’il est, mais maintenant il s’agit de comprendre ce que la personne vit de son côté : les expressions de ce mal-être. A ce sujet, je recommande vivement l’écrit de l’ANACT et l’INRS, Le syndrome d’épuisement professionnel ou burnout : Mieux comprendre pour mieux agir, 2015.

Selon leur guide, voici quelques signes concrets que je trouve primordial de connaître pour comprendre ses collègues ou se comprendre soi-même en situation de burn-out :

  • Symptômes émotionnels : peurs, tensions nerveuses, humeur triste, pertes de contrôle (irritable, tendu, hypersensible), voire aucune émotion comme une coquille vide.
  • Symptômes physiques : troubles du sommeil, tension musculaire (dos, nuque…), prise ou perte de poids rapide, maux de tête, nausées et vertiges.
  • Symptômes cognitifs : diminution de la concentration, difficultés à être multitâche, indécision, erreurs mineures multiples, fautes et oublis.
  • Symptômes comportementaux : baisse de la tolérance, repli sur soi, isolement social, comportement agressif et violent, frustration, ressentiment et hostilité.Certaines personnes peuvent avoir des comportements additifs (alcool, opiacés, tabac…)
  • Symptômes motivationnels : remise en cause constante, dévalorisation, perte de l’estime de soi et démotivation.

Avec tous ces éléments, on va pouvoir aller sur le terrain ensemble. 🏃

Histoire d’une recruteuse qui a vécu un burn-out

Il y a quelques semaines, je vous ai demandé sur LinkedIn si vous aviez déjà vécu un burn-out ?

Vous avez été 88 à me répondre (merci encore pour votre participation 🙏). Majoritairement des acteurs du recrutement et des ressources humaines : du plus junior au plus sénior, jusqu’au Talent Acquisition Manager ou Responsable RH.

C’est donc 57% d’entre vous qui ont déjà vécu un burn-out. Plus précisément, c’est 19% diagnostiqués et 38% non diagnostiqués.

Le chiffre est faramineux ! Tout autant que le pourcentage de personne qui ont vécu un burn-out sans que cela soit forcément mentionné à l’entreprise. Ma réflexion à ce sujet est que certains se rendent compte bien plus tard qu’ils ont été au bord ou qu’ils ont fait un burn-out, une fois parti de la société. Il peut aussi être question de peur, une crainte du jugement, de le dire à l’employeur.

Alors j’ai décidé de discuter avec une personne qui a vécu un burn-out diagnostiqué et qui a accepté d’échanger à ce sujet avec vous et moi. Encore merci pour son partage en toute intimité et son temps. 🙏

En toute transparence, elle va nous permettre aujourd’hui de se mettre un peu à sa place. Son prénom a été modifié par souci d’anonymat.

Camille, actuellement Senior Tech Recruiter en RPO - Paris

Voici le contexte professionnel dans lequel Camille travaillait :

“Le premier burn-out diagnostiqué c’était en 2016, en Entreprise de Services Numériques, ils sont allés très loin à l’époque. 25 entretiens positionnés par semaine avec un taux d’annulation de 25% autorisé. Pour te dire à quel point c’était cadré. Ça commençait à 9h, parce que toute la société France ouvrait à la même heure donc si t’arrivait à 9h01 c’était un peu compliqué. Parce que tout le monde avait déjà commencé. Tu avais 48h ouvré pour faire entrer un candidat dans un process, à partir de là les autres recruteurs avaient le droit de piocher dans ton pipe. C’était très militaire. Tu avais ton système de mentor mais ton mentor était aussi ton concurrent. Là c’est qu’en région parisienne, tu rajoutes les autres régions France, plus les autres régions monde… Donc je te laisse imaginer l’hyper-concurrence qu’il pouvait y avoir. Et il fallait éviter de partir à 18h sinon c’était pas forcément bien vu. Fallait que tu fasses au moins tes 5 candidats positionnés par semaine. Sachant que l’objectif final c’était 25 recrutements par semestre. Et la société était à plus d’une heure et demie de chez moi."

Camille était donc dans un contexte de stress, de pression et d’attentes élevées. On retrouve aussi une situation spéciale d’hyper-concurrence et des horaires à la seconde près. De quoi créer un environnement néfaste et anxiogène.

Au-delà du cadre de la structure, il y a aussi les professionnels qu’elle côtoyait :

“Il y avait la responsable RH et puis tu avais une N+2 qui est arrivée entre-temps. Et aux réunions hebdo on devait donner nos chiffres. Devant tout le monde. Moi je fonctionnais à l’objectif final et eux voulaient les moyens et les résultats.”

On remarque déjà une dissonance entre la vision de son travail que souhaite Camille et la vision imposée par sa hiérarchie. D’autant plus que cela s’affirme dans des réunions où le ton est donné.

Camille a aussi connu un manque de reconnaissance malgré le travail fourni, par cette même hiérarchie :

“En gros, je faisais le nombre de recrutement attendu, ils me disaient que j’étais dans le top au niveau des recruteurs, mais par contre je ne mettais pas assez d’entretiens. En fait j’étais à 10-15 entretiens par semaine, au lieu de 25, pour atteindre le nombre de recrutement nécessaire. Sauf que pour eux ils partaient du principe que si je mettais plus d’entretiens, je ferai plus de recrutements“.

Le manque de reconnaissance est d’autant plus douloureux lorsque la personne donne tout pour réussir et que tout s’écroule.

“Moi j’étais à fond. Après tu as des typologies de personne qui s’engouffrent plus, moi j‘ai tendance à être assez perfectionniste. Un mélange entre le syndrome de l’imposteur et le syndrome de la bonne élève. Pour moi, le travail c’est ce qui faisait ma valeur. Ça faisait beaucoup mais je voulais toujours bien faire, je voulais toujours y aller. Et puis aussi le manque de maturité, au début tout est beau tout est joli donc je me mets à fond mais le retour à la réalité ça fait un peu mal”.

Cet échange est intéressant. Camille le souligne, en parlant de réalité qui fait mal. On voit bien le stade de la désillusion qui prend place. Même si c’est lié à son envie de faire un travail parfait et de construire son identité par sa profession, Camille ne se voit pas récompensée pour le fruit de son labeur.

Le quotidien n’est plus agréable :

“Je me sentais pas bien. J’avais toujours cette appréhension quand j’étais en réunion. Avec mes collègues ça ne se passait pas bien aussi.”

On pourrait penser que c’était là qu’elle se rendrait compte d'être au bord du burn-out, mais ce sera tout autre chose :

“Donc je m’engouffre, je m’engouffre, et je ne parlais que de ça. Et là, le déclic : j’avais ma meilleure amie au téléphone. Moi je lui parlais de ce qui n’allait pas au travail alors qu’elle subissait un avortement. J’ai été honteuse de ne pas m’être intéressée et du coup j’ai pris RDV chez un médecin traitant”.

On voit, ici, que Camille a su prendre les devants et contacter d’elle-même un professionnel. Elle n’a pas attendu le craquage mais plutôt a écouté son déclic. La situation aurait pu durer encore longtemps et sa propre situation aurait pu s’aggraver mais ça n’a pas été le cas.

Malgré tout, il aura fallu 4 mois avant de consulter :

Je peux te dire que ça reste encore gravé, ça a duré 4 mois et 1 semaine avant de diagnostiquer mon burn-out. On m’avait validé ma période d’essai et une semaine plus tard c’est là que j’ai posé ma démission. J’ai expliqué à mon médecin traitant tout ce qui s’est passé et elle a décidé de me mettre en arrêt pendant 2 semaines pour que je puisse prendre de la distance. Elle m’a dit ça va, vous êtes encore au début, je vous laisse 2 semaines, à vous de voir si vous voulez échanger avec votre employeur, trouver des solutions ou alors changer d’employeur. Je pense que ça a été pris à temps. Mais je pense que jusqu’à maintenant il y a encore des traces de ça. Pour moi c’est un peu mon système d’alarme et c’est un peu compliqué de faire confiance. Dès qu’il y a un cadre qui est trop rigide ça me bloque et je me renferme, je suis dans mon monde.

Camille a eu le courage de prendre cette décision : la démission. Cela a sans doute préservé sa santé et permit que son burn-out soit décelé à temps pour ne pas tomber dans un ensemble de syndromes plus conséquents. Mais le fait de ne pas avoir eu de prise en charge longue durée laisse forcément des marques qui modifient sa vision du travail.

Le rapport au travail et à la hiérarchie est repensé, le sens qu’elle donne à son métier aussi.

Dans d’autres cas, la vie quotidienne peut être touchée et le corps garde des séquelles irréversibles liées au stress.

Alors, est-ce qu’avant d’en arriver là, une entreprise aurait pu déceler et prévenir de ces risques au sein de sa structure ?

Comment prévenir le burn-out ?

Le burn-out en entreprise n’est pas uniquement un sujet de marque employeur, de turn-over ou d’engagement. Il serait prétentieux voire déplacé de la part d’une société d’y coller aussi facilement l’étiquette marketing ou business sans voir la gravité des faits que cela peut induire.

Ça va plus loin, il est question de santé (et pas uniquement de santé au travail). Il est même question de responsabilité de la part d’un employeur. Si le (bon) travail est un devoir de la part d’un salarié, des conditions de travail optimales et saines, elles, sont un droit pour chacun.

Le burn-out, on en parle en long en large et en travers. Que ce soit une vraie problématique en entreprise ou un sujet LinkedIn qui génère des likes, au final on sait qu’il est important d’en parler. Vulgariser le concept ainsi que le rendre compréhensible et détectable, permet (en partie) d’en prévenir les risques en se centrant sur la notion de qualité de vie au travail et de risques psychosociaux.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que lorsqu’un burnout a lieu, nous avons tendance en tant qu’humains à vouloir s’isoler car en parler c’est accepter une forme d’échec qui peut être ressenti. Peu d’entre nous apprécient l’échec, n’est-ce pas ? 🤔

Ça rend sa détection compliquée et délicate (n’oublions pas que vous étiez 38% dans le sondage à, peut-être, ne pas l’avoir mentionné à votre employeur). Alors, lorsqu’on s’attaque à un sujet pareil en entreprise, il peut être pertinent de le voir sous 3 angles et ce parfois bien avant le point de craquage d’une personne :

  • Prévention primaire : Elle arrive en amont, avant que les situations propices au burn-out n’apparaissent. Ce sont toutes les actions permettant de maintenir l’état sain et paisible d’une personne dans l’entreprise : définition des rôles et acteurs cibles de la société, management sain, conditions de travail optimales, attentes majoritairement comblées, etc.
  • Prévention secondaire : A ce stade, la situation commence à se détériorer et les premiers signes d’épuisement se voient. Mais l’entreprise le remarque et agit. C’est souvent le moment des formations, le moment de déterminer des actions de désengorgement de la situation avec un suivi personnalisé et une écoute attentive.
  • Prévention tertiaire : Souvent, il est trop tard. La médecine du travail détecte un burn-out et la personne est en arrêt. Mais ça ne veut pas dire qu’il ne faut rien faire ! C’est à des actions curatives qu’il faut penser : un soutien psychologique, un système de libération de la parole, un traitement des conditions de travail qui ont mené à ça, un arrêt maladie pour se reposer, etc.
Le modèle descriptif de l'IPBO

Prenons l’exemple de Camille. Dans un premier temps, il y a des éléments propres aux conditions de travail et à l’entreprise. Si la société où elle a travaillé en 2016 veut éviter des burn-out à répétition dans ses services alors il faut :

  • Donner une marge d’autonomie et faire confiance : Si Camille n’a besoin que de 15 entretiens au lieu de 25 pour répondre à l’objectif final fixé, c’est ainsi. Pas besoin d’en demander plus. L’envie de faire plus doit venir de l’employé et dépend de la personnalité de chacun, sinon ça devient une contrainte
  • Réduire l’hyper-concurrence : favoriser l’entre-aide entre les recruteurs, fixer des objectifs communs et rendre l’étape du sourcing plus collaborative. Le style de récompense au sourceur et au recruteur est un bon moyen par exemple.
  • Favoriser les heures de travail saines : se plaindre d’un départ à 18h devrait être dépassé depuis des années maintenant… 😒 Mais il semble bon de rappeler régulièrement que partir à l’heure ce n’est pas partir trop tôt. Cette pression malsaine favorise la peur et le désengagement.
  • Analyser devant tout le monde, oui mais pas n’importe comment : l’analyse de la performance d’un employé devant tout le groupe est possible lorsque le feedback est constructif et bien réalisé. L’exercice prend une forme de solidarité où chacun peut aider et conseiller. Cependant, il ne faut pas oublier que chacun est unique. Certaines personnes, malgré un espace safe, auront du mal à se prononcer devant tout le monde. Il ne faut pas forcer !

Il y a également d’autres points, plus personnels et propre à Camille :

  • Faire preuve de reconnaissance : le fait de mentionner son top performing ne suffit pas car les paroles qui suivent sont en contradiction. Tout le monde ne vit pas de reconnaissance, mais souvent ça ne coûte rien d’en faire preuve à l’égard de ses employés.
  • Nuancer Camille : ayant une personnalité perfectionniste et voulant tout donner au travail, Camille a besoin d’être un peu plus canalisée. Lui rappeler régulièrement qu’il faut se déconnecter du travail et ne pas la mettre dans des situations d’engagement beaucoup trop fort peut l’aider à prévenir d’un potentiel burn-out.

Et enfin il y a également l’après, sur lequel Camille aurait pu être accompagnée plus longuement :

  • Réduire les séquelles du burn-out : après un burn-out, tout ne revient pas à l’ordre. Une personne reste marquée. L’objectif est de réduire ces marques et d’apprendre à vivre avec une nouvelle conception du travail et un nouveau rapport. Un suivi psychologique de soutien tout de suite après les faits est souvent bénéfique pour passer au-dessus de tous ces changements.

J’aimerais clôturer cet article sur une réflexion que nous avons partagé Camille et moi :

"Je pense que le recrutement est sujet à burnout car ça manque de possibilités de contrôle : notre réussite dépend du bon vouloir des autres que ce soit côté candidat ou côté manager. Le burn-out des recruteurs est aussi lié à la dévalorisation du métier et le travers des KPI. C’est bien, ça aide à donner un cadre mais parfois c’est trop."

Est-ce qu’un métier peut être plus sujet au burn-out qu’un autre ?

Je pense que oui, certains métiers sont plus sujets à la pression que d’autres mais je pense surtout que c’est lié à la désillusion cette fois-ci d’un métier tout entier plutôt qu’à une entreprise qu’on s’imaginait.

Le recrutement est une profession peu connue dans sa réalité. On tombe dedans par hasard, ou c’est une reconversion peu réfléchie, ou c’est un moyen d’ouvrir les portes d’un domaine plus large tel que les RH. Dans tous les cas, il est souvent associé à une position d’exécutant comme dirait une très bonne amie à moi.

C’est un métier où la reconnaissance est peu présente et où les attentes peuvent venir de tous les côtés, sans qu’on s’y attende parfois.

Le recrutement c’est aussi un condensé de plusieurs tâches, et il faut apprendre vite et bien. Car il n’y a pas 2 chances : une fois un candidat perdu, il est difficile de rattraper une situation. Il faut parfois jongler avec des antécédents (une entreprise ayant déjà une mauvaise image, des outils archaïques, des chiffres démesurés, etc.) mais surtout il faut une résilience à toute épreuve.

Cette désillusion fait que les recruteurs partent (lors d’une conférence j’avais entendu qu’en moyenne un recruteur restait recruteur 5 ans seulement) mais certains avant de partir subissent ce choc d’autant plus quand les conditions de l’entreprise sont anxiogènes.

Alors prenons soin de notre profession avant tout. ❤️

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