Les secrets des KPIs en recrutement

Laura Chérubin
Les secrets des KPIs en recrutement

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À l’heure où la fonction Talent Acquisition gagne en visibilité au sein de l’entreprise, et surtout fait sa place en tant que business partner stratégique, elle fait également ses preuves sur les aspects analytiques.

Là où le recrutement était avant vu comme du simple tri de CV et des entretiens, on voit aujourd’hui une valorisation du métier et de la valeur qu’il peut apporter.

Les discussions autour du recrutement s’immiscent désormais dans les plus hautes sphères de décision de l’entreprise. Un exercice d’autant plus difficile quand on sait à quel point le recrutement peut être imprévisible. Pour aligner les discours, quoi de mieux que des éléments factuels, sur lesquels les parties prenantes peuvent s’aligner ? 

Parlons peu. Parlons bien. Parlons KPIs.

GIF Kaamelott

Les KPIs en recrutement : quoi, pourquoi et pour qui ? 🔍

Quand on parle de KPI en recrutement, de quoi parle-t-on exactement ? 

Rappelons-le, un KPI ou Key Performance Indicator, permet le pilotage et la mesure de l’efficacité de son activité.

Bien souvent présenté du point de vue  quantitatif, l’aspect qualitatif ne doit pas être mis de côté car il apportera de la nuance et de la granularité à vos analyses.

Pourquoi les KPIs sont-ils importants en recrutement ?

On le sait tous, le recrutement est très souvent une activité “tunnel” : on sait quand on rentre, mais on ne sait pas quand on sort. 

Il est très facile de se perdre dans des heures d’entretiens, dans la rédaction d’un nombre incalculable de feedbacks, dans des dialogues de sourds avec les parties prenantes au processus de recrutement… Tout ça pour ? Au final, ne recruter personne, ou être en deçà des objectifs.

C’est pour ça qu’il est essentiel de :

  • savoir où on se situe à l’heure actuelle : autrement dit, regarder derrière soi et prendre note du chemin parcouru jusqu’à maintenant
  • analyser ce parcours : se pencher sur ce qui a marché, ce qui n’a pas marché, ce qui pourrait être amélioré
  • prendre des décisions : sur la base des analyses menées, décider de la direction à suivre pour maximiser les résultats
  • communiquer : recruter est un sport d’équipe, donner de la visibilité aux parties prenantes est donc primordial pour se donner les chances de réussir

J’aime beaucoup cette citation de Peter Drucker, professeur, auteur et consultant américain en management d'entreprise : “If you can’t measure it, you can’t improve it”. Autrement dit, “si tu ne peux pas le mesurer, tu ne peux pas l’améliorer”. ⚖️

Cela semble évident non ? Comment est-il possible de s’améliorer si nous n’avons aucune idée de ce qui a été fait ? Et quand je dis “aucune idée”, je ne parle pas d’une hypothèse ou d’un ressenti, mais bien d’un fait concret.

L’objectif ici est bien de retirer les a priori, les préjugés, les biais que l’on peut avoir, pour se concentrer sur des éléments factuels, pragmatiques, mesurables.

Pourquoi ?

  • les indicateurs, qu’ils soient quantitatifs ou qualitatifs, ne mentent pas : ils sont le reflet de votre activité réelle, et non “perçue”
  • l’utilisation de ces indicateurs est difficilement contestable : les parties prenantes vous verront comme quelqu’un de pragmatique, terre à terre, orienté solution
  • la compréhension fine et structurée de votre activité vous permet de vous émanciper d’un simple rôle d’exécutant et d’adopter une posture plus stratégique

De manière (très) simplifiée, on peut imaginer que les recruteurs ont une “obligation” de résultats, dans le sens où ils ont des objectifs de recrutements à atteindre.

De manière un peu plus implicite, on peut éventuellement aller jusqu’à dire que les recruteurs ont partiellement une “obligation” de moyens, et par là, j’entends la mise en œuvre de mesures qui contribueront à l’atteinte des objectifs.

Pour autant, s’arrêter aux chiffres serait une erreur. Il est important d’aller au-delà pour réussir à apporter de la valeur. Au lieu de penser “résultat”, on pense donc “impact”.

Rappelons-le, un KPI n’est, à proprement parler, qu’un indicateur.

Gif Kaamelott

Il ne fait que mettre le doigt sur un morceau d’activité. Seul, un indicateur ne veut rien dire. Il est important de lui donner un contexte et de lui faire raconter une histoire.

Oui oui, vous avez bien lu : il faut que les chiffres racontent leur histoire, sans cela, ils restent creux et dénués de sens.

Si je vous dis “85% est un bon taux de conversion”, vrai ou faux ? 🤔

Et bien il n’y a pas de bonne réponse ici car on ne connaît ni le contexte, ni l’histoire derrière ce chiffre : 

  • que calcule ce taux de conversion ?
  • où se situe-t-il dans le process de recrutement ? 
  • comment a-t-il évolué au fil du temps ?

Il est important d’adopter une approche holistique quand on parle de KPIs : on ne peut pas tirer de conclusion sur la base d’un seul chiffre. Il faut l’appréhender dans son entièreté pour en faire quelque chose d’intéressant.

Et oui, les KPIs peuvent révéler des vices cachés et surtout être bénéfiques pour tous :

  • tout d’abord, pour le recruteur : le suivi et l’analyse des KPIs permet de (re)prendre la main sur son pipeline de recrutement et de ne pas le subir (ou en tout cas, de faire ce qui est en votre pouvoir pour ne pas le subir), c’est ce qui rend le rôle stratégique
  • pour le manager du recruteur : ne rentrons pas dans le débat du “flicage” d’activité, qui est bien entendu absurde, et voyons les aspects positifs, que sont l’accompagnement et la formation des recruteurs, la reconnaissance et la valorisation de leur travail
  • pour les Hiring Managers : les KPIs leur donnent de la visibilité, leur ouvrent peut-être les yeux sur des obstacles dont ils n’avaient pas connaissance, et surtout leur apportent les billes nécessaires à la prise de décisions

Rentrons dans le vif du sujet.

Quels KPI choisir ? Par où commencer ? 👟

Je n’ai tout bonnement pas de recette magique à vous communiquer pour répondre à cette question.

Et c’est une bonne chose, car c’est à VOUS de vous poser les bonnes questions : 

  • dans quel contexte suis-je ? 
  • à quelle donnée puis-je avoir accès ?
  • que serait-il intéressant de tracker ?
  • qu’est-ce que je cherche à tirer de ces KPIs et de ces analyses ?
  • à quelle problématique est-ce que je fais face ?
  • comment est-ce que je souhaite y répondre ?

Bref, vous l’aurez compris : autant de réponses que de recruteurs ici présents.

Par contre, une chose est sûre : there is no “one size fits all”.
Ne cherchez pas à appliquer au pied de la lettre ce que font vos voisins ou les entreprises que vous considérez comme modèles. Ce qui fonctionne pour elles pourrait ne pas fonctionner pour vous, et inversement. 

Soyez pragmatiques et posez-vous les bonnes questions, celles qui vont répondre à votre contexte, à vos problématiques, à vos populations (candidats et Hiring Managers).

Bien entendu, je ne vais pas vous laisser avec ça : je vais vous parler de KPIs “classiques” à suivre et de la manière dont on peut les interpréter.

Time To Fill et Time To Hire

Il y a souvent beaucoup de confusion entre ces deux notions. Bien que complémentaires, elles sont différentes et ne reflètent pas la même chose.

👉 Time To Fill : la différence entre la date à laquelle vous avez lancé le poste et la date à laquelle vous avez recruté quelqu’un (en général, la date d’acceptation de l’offre).

Souvent exprimé en nombre de jours, cet indicateur sert souvent à suivre les projections budgétaires et la planification de ressources. Ici, il vous donne des informations sur l’état de santé du recrutement sur un rôle : en termes d’inbound, d’outbound, tensions sur le marché…

Un Time To Fill qui tend à être trop long met l’accent sur quelque chose qui ne va pas à l’échelle du rôle et montre qu’il y a peut-être des leviers à activer pour avancer sereinement sur ce recrutement.

👉 Time To Hire : la différence entre la date à laquelle un candidat est entré en process (depuis la candidature ou le sourcing) et la date à laquelle il est recruté.

Également exprimé en nombre de jours, cet indicateur sert à suivre l’efficacité et la vélocité du process de recrutement sur un rôle.

Un Time To Hire qui tend à être long indique qu’il y a des éléments qui viennent ralentir le process de recrutement. N’oublions pas de remettre en contexte ce chiffre : peut-être que le candidat a peu de disponibilités pour rencontrer les équipes, peut-être qu’un interviewer a été malade et qu’un entretien a été reprogrammé…

👉 Petit bonus : Time Spent in Stage : le nombre moyen de jours passés à chaque étape du process.

Pour apporter plus de granularité au Time To Hire, cet indicateur permet de rapidement identifier les étapes auxquelles les candidats passent le plus de temps dans le process. En avoir connaissance vous permet ensuite de pouvoir agir dessus et tenter de le diminuer (si cela fait sens dans votre contexte).

L’évolution du funnel

👉 Recruitment funnel and conversion rates : le nombre de candidats à chaque étape du process, ainsi que les taux de conversion entre chaque étape.

Le nombre de candidats à chaque étape vous donne une idée de la volumétrie gérée pour un rôle (à combien de candidats ai-je parlé au début du process ? Combien de candidats ont été vus en entretien d’expertise ? À combien de candidats avons-nous étendu une offre ? etc.)

Les taux de conversion entre chaque étape représentent le succès des candidats pour passer à l’étape suivante. Un funnel “parfait” sur le papier n’aurait que des taux de conversion de 100% : un seul candidat entre en process, il réussit avec brio toutes les étapes et est recruté. 

La réalité est un tant soit peu différente : dans ce cas, on vise plutôt des taux de conversion croissants (plus on avance dans le process, plus les taux de conversion augmentent). Cela veut dire qu’une forte sélection est réalisée au début du process, pour ne faire avancer que ceux qu’on estime être à la hauteur de l’étape suivante. Naturellement, on continuera à voir des candidats qui arrêtent le process, mais ils seront de moins en moins nombreux.

👉 Candidates over Time : l’évolution dans le temps du nombre de candidats pour un rôle.

Peu importe l’échelle de temps qui est déterminée pour cette analyse (chaque semaine, chaque mois ou autre), l’idée ici est de dégager des tendances en termes de volumétrie. Cela peut vous aider à mettre en lumière les raisons pour lesquelles vous avez rencontré moins de candidats pendant une période donnée par exemple.

L’analyse des candidats

👉 Candidate Sources : le nombre de candidats classés selon leur source (idéalement à chaque étape).

Cet indicateur permet d’identifier rapidement les sources de candidats pour un poste (Inbound ? Si oui, via quels canaux les candidats postulent-ils? Outbound ? Si oui, où allons-nous chercher les candidats ? Cooptations ? Si oui, qui sont les cooptants ? etc.) et surtout la “fiabilité” de ces sources.

Une source considérée comme “fiable” amènera proportionnellement plus de candidats à la fin du process. Cela permet également d’identifier d’éventuelles sources manquantes pour les adresser, et de miser sur les sources les plus prometteuses (vous investissez vos efforts là où semblent être les candidats les plus qualifiés).

👉 Rejection Reasons : les raisons pour lesquelles des candidats ne poursuivent pas le process (idéalement à chaque étape).

Cet indicateur permet d’identifier les causes pour lesquelles les candidats arrêtent le process (est-ce à leur initiative car le salaire n’est pas à la hauteur de leurs attentes ou parce que le rôle n’offre pas assez de flexibilité ? Est-ce à notre initiative car le candidat n’a pas les compétences requises ?).

Il est utile pour refléter l’état du marché qui se présente à nous, et prendre d’éventuelles mesures correctives si cela fait sens.

Après la théorie, la pratique 📈

Les idées prennent forme, vous savez ce que vous voulez analyser. Place à la mise en œuvre de ces reportings ! 

J’ai remarqué que c’est souvent la phase qui fait un peu peur aux recruteurs : “je ne vois pas l’intérêt”, “je n’ai pas le temps”, “je ne sais pas comment faire” etc.

Si vous ne voyez pas l’intérêt des reportings, je vous invite à relire les passages ci-dessus : les reportings vous apporteront de l’information sur votre activité. Cette connaissance vous enrichira et vous donnera les outils pour agir de manière proactive sur votre activité.

Si vous estimez ne pas avoir le temps, voyez la mise en place de reporting comme un investissement : le temps passé à mettre en place le reporting vous rapportera assez de visibilité et d’éléments pour ne plus perdre de temps par la suite. Cet investissement vous fera sortir de l’effet tunnel pour que vous investissiez votre temps et votre énergie au bon endroit.

Si vous ne savez pas comment faire, je vous invite à lire la suite et surtout à faire preuve de curiosité : un reporting ne se construit pas tout seul, il reflète l’intelligence que vous lui insufflez.

Les plus chanceux auront accès à ces données grâce à leur ATS, en configurant les bons reportings. D’autres devront se contenter d’un fichier Excel ou Google Sheets, certes moins pratique, mais qui ne doit pas être négligé (mieux vaut une base de reporting que rien du tout). 

La mécanique de l’ATS ? 📊

Selon l’ATS avec lequel vous travaillez, vous aurez accès à des reportings plus ou moins performants et plus ou moins détaillés.

Dans tous les cas, je vous invite à lire la documentation de votre ATS, et surtout à “jouer” avec les reportings : rien de mieux que la pratique pour apprendre à manipuler un outil, à comprendre son fonctionnement, identifier les limites et essayer d’y remédier.

Et dans ce cas, deux choix sont possibles : 

  • se baser sur les reportings et les dashboards disponibles directement depuis l’interface de l’ATS.
  • connecter l’ATS à une solution du type Google Sheets : l’objectif étant d’importer les reportings de l’ATS dans Google Sheets, pour pouvoir manipuler plus facilement la donnée, et éventuellement croiser les reportings entre eux pour leur faire raconter une histoire

J’ai la chance d’avoir accès à un ATS qui permette ce type d’intégration et j’en suis très satisfaite. Je tiens aujourd’hui un reporting par rôle, ce qui me permet de suivre au plus près l’activité recrutement sur chacun des rôles pour lesquels je recrute. Le tout, en ayant une vision à la fois globale, et à la fois spécifique si je souhaite rentrer dans le détail d’un reporting en particulier.

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Avant cela, je tenais un reporting qui était principalement manuel, n’ayant pas accès à un ATS offrant des fonctionnalités de reporting à la hauteur de mes attentes.

Dans ce cas, curiosité et organisation seront les maîtres mots d’un reporting réussi. Qu’il soit sur Google Sheets, Excel ou tout autre outil de votre choix, il demandera un investissement un peu plus important (pour un retour sur investissement qui n’en sera pas des moindres, promis !).

Dans la mesure où vous avez un ATS, un CRM ou toute autre plateforme qui vous donne accès à de la donnée, utilisez-la et maximisez son usage.

L’objectif ici sera de centraliser la donnée dans un seul et même fichier, que vous pourrez manipuler à votre guise. Il vous faudra donc suivre rigoureusement : 

  • la date de lancement d’un rôle
  • la date à laquelle le candidat a été recruté
  • la date à laquelle ce candidat est entré en process (pour calculer le Time To Hire), à défaut d’avoir accès à un reporting du type “Time Spent in Stage”
  • le volume de candidat à chaque étape
  • les taux de conversion (que vous pourrez calculer facilement à partir du volume de candidat à chaque étape)
  • etc.

Bien que cela puisse sembler fastidieux et chronophage (et ça peut l’être dans une certaine mesure), ce sont des informations qui n’ont pas de prix pour vous aider à recruter vite et mieux.

Une fois que ces reportings sont mis en place, il est important d’en faire quelque chose ! Les suivre et les analyser régulièrement sont des actions à intégrer dans votre routine pour vous rendre plus agile, plus réactif et plus stratégique.

Régulièrement ? C’est-à-dire ? À vous de trouver votre rythme, celui qui vous semble pertinent au vu de votre charge de travail, de l’activité sur vos recrutements et surtout de l’impact que vous souhaitez avoir.

À titre personnel, je mets à jour ces reportings chaque fin de semaine (pour voir s’il y a eu un gros changement d’une semaine à l’autre), et je prends du temps toutes les deux semaines pour la partie analyse, recommandation et communication aux parties prenantes.

Un bon reporting, c’est un reporting qui reflète votre activité et qui vous transmet la connaissance nécessaire à son amélioration.

À vos marques ? Prêt(e)s ? Bons reportings, je vous souhaite beaucoup de réussite et d’impact ! 💥

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À propos de l'auteur·e
Laura Chérubin
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