L’embauche et l’âge du candidat : quels dispositifs mis en place ?

Julie
L’embauche et l’âge du candidat : quels dispositifs mis en place ?

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L’embauche et l’âge du candidat : décryptage 

L’embauche et l’âge du candidat sont-ils liés ? Malheureusement, et on ne peut pas le nier, ces deux facteurs le sont très souvent. Aujourd’hui, les processus de recrutement semblent délaisser certains profils. Il existe une fâcheuse tendance à se ranger du côté des idées reçues et des stéréotypes. Par ailleurs, les candidats juniors et seniors en sont les premières victimes. C’est un fait : l’âge peut poser problème dans les processus d’embauche. Néanmoins, que dit la loi à ce sujet ? Place au décryptage.

Profil junior, profil senior, quésaco ? 

Lorsqu’une entreprise publie une offre d’emploi, elle y précise le profil du candidat souhaité. Bien souvent, une multitude de personnes à la recherche d’une nouvelle opportunité professionnelle répondent aux annonces. Toujours est-il que certaines catégories de postulants semblent ignorées par les recruteurs.

Leur point commun ? L’âge.

Les profils junior/senior

L’embauche et l’âge du candidat sont-ils véritablement liés ? Avant de répondre à cette question, revenons aux fondamentaux. Qu’est-ce qu’un profil junior ? À quelle catégorie de travailleurs fait référence l’expression « senior ». En bref, de qui parle-t-on exactement ?

Ces notions paraissent simples, n’est-ce pas ? Pourtant, elles sont la cible de nombreuses confusions. Alors, il est temps de faire le point. 

  • L’appellation « junior » vise les jeunes qui s’insèrent sur le marché du travail. En règle générale, ils ont peu, voire pas, d’expérience en entreprise. 
  • L’expression « senior » correspond aux postulants âgés de plus de 45 ans.

Attention aux confusions

Soyez vigilant. Les mentions d’un profil junior ou, encore, senior peuvent mener à diverses confusions. En effet, il n’est pas rare qu’elles ne désignent pas l’âge, mais le niveau d’expérience du postulant. 

En pratique, cet emploi n’est guère erroné. Néanmoins, ce double sens peut poser problème quant à la clarté de notre propos. Selon le contexte rencontré, il devient impératif de savoir s’il est question de l’âge ou de l’expérience du candidat. Car, oui, la confusion viderait notre raisonnement de toute substance. Explications.

  • Un candidat junior, c’est-à-dire nouveau sur le marché de l’emploi, peut bénéficier de plusieurs années d’expérience alors qu’il est en quête de son premier emploi. Il a pu, par exemple, être alternant durant ses études.
  • Une postulant senior peut avoir une grande expérience, tout en commençant sa carrière dans le domaine visé. C’est notamment le cas des salariés qui ont décidé de réaliser une reconversion professionnelle. Au regard de son âge, ce candidat possède un profil senior. Néanmoins, si l’on place le niveau d’expérience au cœur de notre raisonnement, il est un candidat junior, d’où le risque de confusion.

Ainsi, dans cet article, nous aborderons les notions de profils junior/senior sous l’angle du facteur de l’âge.

L’embauche et l’âge du candidat, que dit la loi ?

Existe-t-il des dispositions légales relatives à l’âge du candidat à l’embauche ? Le droit protège-t-il les juniors et les seniors à la recherche d’un emploi ? Ensemble, décryptons la législation française. 

L’article L1132-1 du code du travail 

En France, le législateur confère une grande liberté aux entreprises qui recrutent. Par ailleurs, celles-ci disposent d’une belle marge de manœuvre quant à la rédaction de leurs offres d’emploi. Toutefois, elle n’est, pour ainsi dire, pas sans limite. 

En effet, tout employeur doit non seulement respecter la réglementation de l’offre d’emploi, mais aussi la réglementation de l’entretien d’embauche. Parmi les règles de droit à observer lors des recrutements, figure le principe du droit à la non-discrimination.

Le principe du droit à la non discrimination à l’embauche

Prévue à l’article L1132-1 du code du travail, cette disposition met en exergue l’interdiction de désavantager un candidat à l’embauche, sur le fondement d’un critère discriminatoire dont l’âge. 

Pour bien appréhender ce principe, découvrez deux exemples de refus d’embauche tout à fait discriminants au regard de la loi : 

  • le refus d’embauche d’un candidat à un poste de manager en raison de son jeune âge, alors qu’ils possèdent toutes les compétences requises ; 
  • le refus d’embauche d’un candidat, sous prétexte qu’un « senior coûte trop cher ! »

Les sanctions applicables en cas de discrimination à l’embauche

Rappelons que les pratiques discriminatoires lors d’une situation d’embauche sont sévèrement punies par la loi. En cas d’infraction commise par une personne physique, l’article 225-2 du code pénal prévoit une peine 3 ans d’emprisonnement, assortie d’une amende d’un montant maximal de 45 000 €. 

Attention, les sanctions ne se limitent pas aux seules personnes physiques. En effet, les entreprises peuvent également être condamnées. À ce titre, l'article 225-4 du code pénal présente une longue liste de sanctions destinées aux personnes morales, parmi lesquelles : 

  • une amende, dont le taux maximal est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques ; 
  •  l’interdiction temporaire ou définitive d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ;
  • l’exclusion temporaire ou définitive des marchés publics ; 
  • une confiscation d’un ou plusieurs biens ; 
  • l’affichage ou la diffusion de la condamnation de l’entreprise par la presse écrite ou par voie électronique.

Disons-le, la réputation et le portefeuille de l’entreprise peuvent en prendre un coup ! Pourtant, la discrimination à l’embauche va bon train… À présent, le monde du recrutement doit redoubler d’efforts afin d’éradiquer définitivement les pratiques à visée discriminatoires.

L’exception à la discrimination à l’embauche fondée sur l’âge

Vous le savez, les débats sur l’embauche et l’âge du candidat continuent d’envahir la Toile. Toutefois, il faut savoir que certaines différences de traitements sont légalement admises. Autrement dit, l’âge du candidat peut justifier un refus d’embauche aux yeux de la loi. Oui, oui, vous avez bien entendu !

Une dérogation au principe d’égalité des traitements et, par extension, au droit à la non-discrimination peut être justifiée au regard : 

Pour qu’une différence de traitement soit légalement justifiée, celle-ci doit être fondée par un but légitime. Par exemple, sont considérés comme légaux les refus d’embauche destinés à :

  • protéger l’état de santé des jeunes travailleurs et des plus âgés ; 
  • favoriser leur insertion professionnelle ou, dans certains cas, leur reclassement ; 
  • préserver leur sécurité.

Dans cet esprit, certaines professions fixent une limite d’âge dans le cadre des process de recrutement. C’est le cas des pompiers militaires, dont l’acceptation du dossier n’est plus permise au-delà de 25 ans.

Quelles sont les mesures mises en place en faveur du recrutement des jeunes travailleurs ?

C’est un fait, l’âge pose problème au sein des procédures de recrutement. En cela, l’État français s’est vu contraint d’intervenir en faveur de l’emploi des juniors. Au fil des ans, un panel de mesures a été créé pour favoriser leur embauche. 

En 2021, 12,8 % des jeunes de 15 à 29 ans ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en études. Bien que l’État se soit engagé dans une lutte féroce en faveur de l’égalité des traitements, il nous reste un long chemin à parcourir.

Le Contrat d’Engagement Jeune (CEJ)

Le contrat d’engagement jeune, ou CEJ, est une initiative réservée aux jeunes qui font face à des problèmes d’emploi durable. Pour être éligible à ce dispositif, le junior doit être âgé de 16 à 25 ans, ou 29 ans en cas de situation de handicap. En outre, il ne doit ni être étudiant ni disposer de formation qualifiante.

Le CEJ n’est autre qu’un tremplin pour aider les jeunes à rejoindre le chemin de l’emploi. Pour ce faire, ce dispositif vise une insertion professionnelle stable et rapide, à l’aide d’un accompagnement personnalisé et d’une allocation prévue à cet effet.

Les dispositifs deuxième chance 

Autre action à visée éducative, les dispositifs intitulés « deuxième chance ». Il s’agit d’une action mise en œuvre afin de lutter contre les carences des jeunes en lecture, en écriture et en calcul. 

Cette remise à niveau intellectuelle garantit aux juniors un accès facilité au marché de l’emploi, grâce à l’autonomie et aux compétences acquises.

Le plan « 1 jeune, 1 solution »

Récent, le plan « 1 jeune, 1 solution » continue de faire ses preuves. Ce dispositif vise à offrir une solution à chaque jeune, et ce, en mobilisant toutes les ressources nécessaires dont :

  • les aides à l’embauche ; 
  • la possibilité de réaliser des formations ; 
  • un soutien financier pour les jeunes en difficulté ;
  • un accompagnement personnalisé.

Les employeurs, qui souhaitent s’investir dans ce projet, bénéficient de mesures incitatives et d’aides dont ils n’avaient pas forcément connaissance. Le plan 1 jeune 1 solution sensibilise notamment sur le volontariat territorial en administration, en parcours emploi compétence (PEC) ou, encore, en contrat initiative jeune. 

Connaissiez-vous ces différentes possibilités ?

Les contrats d’apprentissage et de professionnalisation

Voilà deux dispositifs qui ont déjà séduit bon nombre d’entreprises ! 

Les contrats d’apprentissage et de professionnalisation sont deux contrats de travail qui reposent sur un système inédit : l’alternance entre l’enseignement théorique et la venue en entreprise. À bien des égards, l’apprentissage et la professionnalisation permettent une insertion professionnelle plus efficace, en plus de l’obtention d’un diplôme. 

Aussi, les entreprises qui embauchent des alternants bénéficient d’avantages, notamment sous forme pécuniaire.

  • L’aide exceptionnelle. Les contrats de professionnalisation, conclus entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2023, permettent aux employeurs de prétendre à une aide de 6 000 €. Cette aide sera versée lors de la première année d’exécution du contrat. Par ailleurs, sa perception est cumulable avec les aides spécifiques pour les apprentis handicapés. Pour être éligible à ce dispositif, l’entreprise doit en respecter les conditions d’octroi
  • L’aide unique à l’apprentissage. Cette seconde aide concerne les contrats d’apprentissage qui visent l’obtention d’un diplôme ou d’un titre professionnel équivalent au plus au baccalauréat. Son obtention concerne exclusivement les entreprises de moins de 250 salariés. L’aide unique de 6 000 € est versée dans son intégralité dès la première année.

Dans les deux cas, il s’agit d’aides financières non négligeables, ce qui explique le succès de ces dispositifs. Pour rappel, en 2022, ce ne sont pas moins de 800 000 contrats d’apprentissage et de professionnalisation qui ont été signés ! 

Quid de l’embauche des profils seniors ?

Tout comme pour les juniors, l’emploi des seniors n’est pas un parcours de santé. À nouveau, l’État s’engage aux côtés de travailleurs plus âgés, qui peinent à demeurer attractifs à l’égard des entreprises.

L’aide de l’État pour l’embauche des seniors en contrat de professionnalisation 

Pour favoriser l’emploi durable des seniors, l’État s’appuie sur son dispositif phare : le contrat de professionnalisation. À ce titre, les entreprises peuvent obtenir une aide financière de 2 000 €, en cas d’embauche d’un salarié de 45 ans ou plus, en contrat de professionnalisation.

Pour être éligibles à ce dispositif, les entreprises doivent respecter les conditions cumulatives suivantes : 

  • l’âge du candidat doit être de plus 45 ans lors de la signature du contrat ; 
  • l’entreprise ne doit ni avoir embauché ni licencié économiquement au cours des 6 derniers mois ; 
  • le senior ne doit pas faire partie des effectifs de l’entreprise au cours des 6 derniers mois avant la date d’exécution du contrat de professionnalisation.

Les contrats d’inclusion pour les seniors 

Aujourd’hui, deux types de contrats d’inclusion peuvent être proposés à un public sénior. 

  • Le CDD inclusion. Mis en place en 2006, ce contrat à durée déterminée a pour objectif d’acquérir des droits supplémentaires afin d’obtenir une retraite à taux plein. Pour prétendre au CDD inclusion, le demandeur d’emploi doit être inscrit depuis plus de 3 mois à Pôle Emploi ou bénéficier d’un contrat de sécurisation professionnelle suite à un licenciement économique. En sus, il doit être âgé de plus de 57 ans.
  • Le CDI inclusion. Depuis 2020, les structures de l’insertion par l’activité économique, plus communément appelées SIAE, ont la possibilité de proposer des CDI inclusion. Pour ce faire, le senior doit avoir plus de 57 ans et se trouver dans une situation de grande fragilité au regard de l’emploi. Une aide financière est prévue pour les SIAE qui recrutent à l’aide de ce type de contrat.

Le CDI et l’index seniors

Le gouvernement avait confirmé qu’un index senior annuel serait mis en place à la fin de l’année 2023, dans les entreprises de plus de 300 salariés. Néanmoins, la saisine du Conseil constitutionnel dans le cadre de la réforme des retraites a abouti à la censure de deux mesures favorables au maintien de l’emploi des travailleurs seniors.

Intéressons-nous toutefois aux spécificités de ces deux dispositifs :

  • L’index senior. Il s’agissait d’un outil qui permettait de mesurer l’implication des entreprises en matière de formation de maintien du recrutement des seniors.  L’objectif initial était de développer des pratiques respectueuses et engagées en faveur de l’emploi des plus âgés.
  • Le CDI seniors. Ce contrat, réservé aux demandeurs d’emploi de longue durée de 60 ans et plus, constituait une mesure incitative pour l’embauche des seniors. En cas de conclusion d’un tel contrat de travail, il était prévu que les entreprises soient exonérées de cotisations familiales durant une année. De même, si le salarié remplissait les conditions pour partir à la retraite, l’employeur aurait eu la possibilité de rompre le contrat sans frais.

L’abandon de ces mesures n’est pas une fatalité. En effet, ces dernières peuvent tout à fait faire l’objet d’une réintroduction au sein d’autres textes de loi. Affaire à suivre.

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À propos de l'auteur·e
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Juriste en Droit des Affaires et Content Manager Freelance. Lorsque je ne suis pas occupée à dévorer un roman ou à faire du canicross, j’écris des articles de blog sur l'univers RH (et le droit !)