Les profils T-shaped, ou tout simplement “profils en T” suscitent de plus en plus l’intérêt (et la curiosité) des recruteurs et des entreprises.
🤦🏻♀️ Encore un anglicisme, me direz-vous.
Je vous rassure, il n’y a rien de saugrenu.
Juste une représentation visuelle de la structuration des compétences de ces profils. Et c’est ce que nous allons voir entre autres dans cet article.
Mais ce qui est passionnant au sujet des profils T-shaped c’est qu’ils incarnent la tendance d’un marché du travail qui évolue, de métiers qui se transforment, d’organisation des entreprises qui se réinventent et d’un accès aux connaissances qui se généralise. 💥
👉 Alors, pour approfondir le sujet, j’ai eu l’immense plaisir d’aller à la rencontre d’Elise Moron. 🙌
Pour ceux et celles qui ne la connaissent pas, Elise est chasseuse de tête et formatrice de T-Shaped Recruiter.
Elle a récemment lancé un Bootcamp pour T-Shaped Recruiter en collaboration avec l’inspirant Léo Bernard.
💬 “Je forme des recruteurs à devenir T-Shaped en leur donnant un coup de pouce supplémentaire au recrutement avec des techniques de marketing, de vente et de Growth Hacking.” Elise Moron
Et si je suis particulièrement heureuse d’aborder ce sujet avec elle c’est parce qu’Elise est une T-shaped recruteuse.
Elise a suivi des études de droit, est devenue avocate spécialisée en droit financier international. En parallèle, elle donne des cours de Droit Civil à la fac et en prépa privée, elle forme des managers de grands groupes aux problématiques juridiques avant de tout plaquer pour l’écosystème start-up qui l’attirait. Elle rejoint une start-up en tant que Head of Business Development où elle touche au sales, marketing, produit et même à l’événementiel. Et là, c’est la révélation ! La diversité des sujets la passionne.
Grâce à cette richesse d’expériences, de rencontres et de compétences acquises, le recrutement s’est présenté alors à elle comme étant le métier qui lui permettrait de mixer et de rassembler tout ce qui l’avait passionné dans son parcours.
Avec une optique du recrutement où le candidat et le client sont au même niveau, Elise a une analyse inspirante du profil T-shaped, qui va au-delà de sa simple description en s’ouvrant au contexte de transformation profonde de notre société qui se cache derrière ces profils. 🔥
Pas le temps de niaiser*, 😇 je vous partage sans plus attendre notre échange.
*”Pas le temps de niaiser” est une expression québécoise qu’Elise m’a fait découvrir pendant notre conversation, et qui veut dire pas de temps à perdre. Et vu que je dévoue une passion insatiable pour les expressions, je suis toujours heureuse de placer celles que j’apprends.
Qu’est-ce qu’un profil T-Shaped ?
💬 ”Le T-Shaped est le parfait mix entre généraliste et le spécialiste. La barre verticale représente l’expertise clé, la barre horizontale les compétences annexes et connexes.” Elise Moron
Il s’agit d’un profil en i (expert dans un domaine), qui en plus va être polyvalent sur d’autres domaines (généraliste).
Concrètement ça donne 👇 :
Et cette représentation visuelle par la lettre T, n’est pas toute jeune. Elle est née dans les années 80 aux Etats-Unis.
Et c’est dans les années 90 que Tim Brown, dirigeant de l’agence de desing mondialement reconnue IDEO a été à l’origine de son utilisation dans le recrutement pour parler de structuration des compétences.
Bien qu’en France, ce concept ne soit pas encore très connu, il commence à faire son chemin dans les esprits de nombreux recruteurs et de nombreuses entreprises.
💬 “Quand tu vois maintenant le brassage des cultures, le brassage des expériences de chacun, c’est un profil qui est atypique mais pas tant que ça au final. Aujourd’hui on ne fait pas un seul et unique métier dans sa vie.
En plus on vit de plus en plus longtemps, donc on a le temps de faire plein de métiers. Et toutes ces reconversions viennent nourrir une expérience et une expertise personnelle qui fait qu’on est tous un peu T-shaped.” Elise Moron
En finir avec certains clichés au sujet des profils T-Shaped
Deux raccourcis communs existent aujourd’hui quand il est question de profils en T :
- D’un côté, ils sont considérés comme des moutons à 5 pattes, capables de tout faire,
- puis de l’autre, ils n’inspirent pas confiance parce qu’ils ont des parcours non linéaires.
Nous ne parlons pas du mouton à 5 pattes
💬 ”Je pense qu’il faut d’abord définir ce qu’est le mouton à 5 pattes de manière générale. Un mouton à 5 pattes n’existe pas. Donc justement, la définition véritable du mouton à 5 pattes c’est de demander un profil qui n’existe pas sur un marché, c’est-à-dire un profil qui ait tellement de cases à cocher qu’il existe peut-être qu’un seul, voire il n’en existe pas.“ Elise Moron
Pas besoin de creuser bien plus loin.
⚡Ce cliché étant percé, s’en est suivi une réflexion intéressante au sujet de l’origine de ce mythe.
D’où vient cette idée qui s’est installée dans l’inconscient collectif ?
💬 “Les dirigeants ont souvent des idées bien précises du profil qu’ils souhaitent recruter, presque une liste à la Prévert. Étonnamment quand je les questionne sur ce que ces profils doivent faire, c’est beaucoup moins précis. Ce qui est assez incongruent in fine.” Elise Moron
Et nous en sommes donc venues à échanger sur une vision du recrutement au travers du prisme de la responsabilité et de la prise risque.
C’est-à-dire qu’il y aurait un côté rassurant à rechercher des personnes qui cochent toutes les cases.
💬“C’est donc pour dérisquer un recrutement, qui peut coûter cher s’il est mal fait, que l’on se tourne vers ces profils qui cochent toutes les cases.” Elise Moron
Et c’est là qu’on finit sans le savoir par s’enfermer dans la quête d’un mouton à 5 pattes. Un profil qui n’existe pas mais qui est rassurant à chercher car si une fois qu’il est déniché, il ne performe pas, ce ne sera la faute à personne parce qu’il cochait toutes les cases. ☔
Elise mettra en lumière qu’il arrive aussi que le profil T-shaped soit confondu à tort avec ce qu’elle appelle le “Jack of all trades” ou le joker qui sait tout faire.
💬 “Et en plus, l’expression en entier c’est “Jack of all trades, master of none”. C’est-à-dire qu’il est bon partout mais expert en rien.
Le T-shaped est lui bon dans plusieurs domaines, et en plus il est expert dans un domaine en particulier.” Elise Moron
Les candidats T-shaped sont atypiques mais ne doivent pas faire peur
💬 “Ça s’appelle la mitigation du risque. Notre cerveau a une aversion du risque naturelle.
On nous a appris à l’école et dans la société qu’il y a une équivalence entre les diplômes et l’intelligence d’une personne.
Il s’agit d’un premier biais.” Elise Moron
Les candidats T-Shaped n’ont pas un parcours linéaire. Ni dans leur formation, ni dans leurs expériences professionnelles et c’est ce qui les définit. C’est par cette diversité de vécus qu’ils peuvent accumuler les compétences.
Pour comprendre pourquoi ils peuvent ne pas inspirer confiance, il faut revenir sur ce prisme de responsabilité et de prise de risque en recrutement, cette mitigation du risque (comme l’appellera Elise).
🚨Le profil T-shaped ne cochera pas toutes les cases. Il demande un changement de perspective quant à ce qui garantit le succès d’un recrutement.
Mais comment est-ce que ce basculement de perspective se déclenche ?
Je tenais absolument à demander à Elise comment elle sensibilisait les dirigeants d’entreprises et managers avec lesquelles elle collabore, à oublier les cases à cocher et à s’orienter vers une autre stratégie.
💬 “En leur démontrant par A + B que le risque peut vraiment payer.
En normalisant les profils un peu plus atypiques.
En montrant scientifiquement que la diversité culturelle, cognitive et de background est fondamentale pour la créativité et a des impacts très positifs sur la productivité.“ Elise Moron
Et le fait de challenger le manager ou le dirigeant au moment de la prise du besoin fait partie des clés pour ce changement de perspective.
Elise challenge toutes les cases à cocher et les listes à la Prévert pour se concentrer dans ce qui est attendu du poste.
💬 “Le brief avec le manager est très important.
Quels sont les résultats attendus : il faut qu’il fasse +60% de croissance en x temps, il faut qu’il signe 10 deals par mois ….
À partir de ça, je peux expliquer qu’il y a des personnes qui peuvent atteindre ces objectifs sans cocher toutes les cases.” Elise Moron
Elle ajoutera ensuite :
💬 “Et j’essaye de les challenger aussi en leur disant que je vais leur présenter des gens qui cochent les cases, mais que je vais aussi leur présenter des gens un peu plus out of the box.
Et dans une short-list de 4 personnes, il va y avoir 2 personnes qui cochent toutes les cases et deux autres qui ne cochent pas tout, qui sont plus out of the box.
Et ça fait 5 ans que je fais ce métier et très souvent ce sont les gens out of the box qui sont recrutés et en plus qui surperforment.
C’est l’ouverture d’esprit par la démonstration.” Elise Moron
Pourquoi il est important d’ouvrir ses chakras à ce genre de profils ?
Nous reviendrons souvent dans cette partie sur l’opposition du statique et du dynamique. Spécialement quand il s’agit d’analyser une tendance, faite par définition de mouvance, qui est en train de transformer le marché du travail, les métiers et qui est aussi en train de redéfinir les facteurs clés de succès des entreprises.
L’évolution du marché du travail et des métiers
85 % des emplois qui existeront en 2030 n’ont pas encore été inventés. C’est un des chiffres que partageaient en 2017 dans son étude, la société Dell et le think tank Institute for the future.
Et nombreux sont les nouveaux métiers qui ont fait leur apparition. Des métiers comme Product owner ou Data scientist, Social Média Manger sont quelques exemples.
Dans ce même rapport, ils exposent 3 raisons qui expliquent la transformation du travail et des métiers :
- le passage de l'humain à la machine,
- la disparition des frontières physiques grâce au numérique
- et le développement de compétences individuelles multiples.
💬 “Il y a un vrai sujet sur la transférabilité des compétences et clairement je pense qu’elle est nécessaire pour toujours évoluer et avoir cette compétence de développement personnel.
Et justement on revient à notre dichotomie statique versus dynamique, agile versus rigide.
Aujourd’hui le statique est amené à disparaître.
Il y aura toujours des entreprises qui resteront dans ce schéma mais qui pour autant ne seront pas innovantes.
Il y a beaucoup de réinvention et presque une révolution copernicienne à faire au niveau des organisations internes des sociétés pour s’adapter au marché, et effectivement c’est extrêmement étonnant de siloter la connaissance.” Elise Moron
Ces mêmes silos qui segmentaient les connaissances, les compétences et donc les métiers avaient un impact direct dans l’organisation des entreprises.
Aujourd’hui ces silos disparaissent et les organisations se tournent vers un modèle davantage agile qui est en mesure de miser sur cette transférabilité de compétences et d’en faire leur fer de lance pour être compétitives et innovantes.
Les profils T-shaped sont nés dans ces transformations des métiers et du marché du travail.
Ils représentent donc une opportunité évidente pour les entreprises. Et c’est ce qui explique que de plus en plus de recruteurs comme Elise par exemple, mais aussi certaines entreprises, sont à la recherche de ce type de candidat.
💬 “Une des premières qualités du T-shaped c’est effectivement son humilité, c’est de toujours remettre en question le statu quo de ses connaissances et la curiosité de découvrir de nouvelles disciplines qui viennent ouvrir une expertise.
Le T Shaped va être dans une connaissance dynamique et pas statique.” Elise Moron
Dans un article paru dans le MIT Sloan Management Review, est exposé un exemple concret de cette transformation de l’organisation des entreprises et de son impact sur les profils qui sont recherchés.
Voici la traduction 👇 :
“La PlainsCapital Bank, l'une des plus grandes banques indépendantes du Texas, a découvert (comme beaucoup dans le secteur) que l'introduction des services bancaires numériques entraînait une baisse de la demande de caissiers humains. Prenant cela comme une opportunité de réinventer le travail de ses employés, PlainsCapital a créé un rôle appelé "banquier universel". Le nouveau poste combine les tâches de caissier sur place avec celles de conseiller financier et d'agent de service à la clientèle, nécessitant à la fois une expertise approfondie des produits et services et des capacités plus larges, y compris la créativité et les compétences interpersonnelles et de résolution de problèmes.”
Et dans ce contexte, les profils T-shaped sont aussi spécialement intéressants pour les entreprises qui se construisent et pour les petites et moyennes entreprises.
💬”Il faut mettre en perspective ce que l’on cherche avec le stade de développement de la société dans laquelle tu es.
La personne que tu vas chercher va être complètement différente en fonction de ton évolution et de ton stade d’avancée.
Si tu es une structure en construction, tu vas avoir tendance à privilégier le recrutement de généralistes, qui sont capables de faire plusieurs métiers à la fois.
Quand on est au début, dans le lancement de quelque chose, on a besoin de gens qui soient extrêmement agiles et qui puissent agir sur plein de sujets différents et être à peu près bons partout.
C’est un stade où il faut rationaliser les compétences et les moyens financiers et donc les moyens humains. C’est donc mieux d’avoir une personne qui gère 5 sujets, plutôt que d’en avoir une seule personne qui est experte et donc gère un seul sujet.
Dans une optique d’optimisation des ressources, tu vas chercher des gens qui puissent faire par exemple un peu de sales, un peu de stratégie produit, un peu de marketing …“ Elise Moron
Et bien sûr impossible de ne pas parler de pénurie de talents quand on parle de marché du travail. 🕳️
Une pénurie de talent présente, omniprésente même, mais qui dans certains cas n’existe pas réellement quand on s’ouvre à ce genre de profils.
💬 ”Il y a eu plusieurs constats de pénurie de marché, un marché qui s’est digitalisé avec des profils beaucoup plus volatiles.
Face à cette pénurie de marché il y a beaucoup de gens qui peuvent perdurer dans une approche du recrutement très classique mais pour autant, ils vont se prendre un mur.
Et tu vas t’entêter à déplorer une situation où tu veux absolument chercher des gens qui cochent des cases mais s’il n’y a plus ces personnes-là, comment tu fais ?
L’idée c’est de contourner le problème par d’autres moyens et l’un des moyens c’est la formation ou la reconversion.
Tu prends les personnes qui ne cochent pas toutes les cases mais qui les cocheront demain.
Et c’est encore une fois ce côté statique/ dynamique.
Une personne est une ressource, mais une ressource infinie, c’est-à-dire qu’il peut changer, il peut apprendre des choses, désapprendre d’autres choses.” Elise Moron
Petite parenthèse sur la reconversion professionnelle
💬 “La reconversion professionnelle crée énormément de T-shaped et c’est une manne pour éviter de se confronter à une pénurie du marché et la contourner. S’ouvrir à ces profils et leur donner le bon set de connaissances est une bonne solution.
Au lieu d’être passifs face à cette pénurie de marché, on peut être proactif.” Elise Moron
Nombreux sont les recruteurs qui insistent sur le fait que la pénurie de talents n’existe pas en réalité dans certains secteurs. Et qu’il existe de nombreuses solutions pour pouvoir trouver des talents qui correspondent réellement au besoin.
Ces mêmes recruteurs parlent des candidats en reconversion comme un vivier souvent inexploité.
Ils ont décidé de changer de métier, se forment tout en conservant les compétences développées auparavant.
💬 “Sans cette révolution copernicienne du mot « talent », les recruteurs continueront à se heurter à la « pénurie de marché » qu’ils décrient. S’ils veulent réussir leur objectif, ils seront contraints d’intégrer les profils T-shaped.” Elise Moron
La formation, moteur du changement
💬 “Il y a une obsolescence programmée de nos connaissances, elles ont une date de péremption et c’est à nous de les remettre au goût du jour avec la formation.” Elise Moron
De toute évidence, notre rapport à la formation a changé. Mais aussi notre rapport aux métiers que nous exerçons.
À ce sujet, Heather E McGowan 🔥, auteur de l’ouvrage “The Adaptation Advantage, Aspirational Polymath, Belligerent Optimist”, partageait dans la vidéo de présentation de son Showreel en 2021 quelques insights qui illustrent ce changement.
Voici une mini-synthèse.
👉 Avant :
Elle y décrit l’ancien paradigme divisé en trois grandes étapes : l’éducation, la carrière professionnelle et la retraite.
Dans ce fonctionnement, évoluaient des personnes qui faisaient un même métier toute leur vie. Ils évoluaient de manière linéaire au sein du même métier, voire d’une même entreprise.
Généralement, ils suivaient une seule formation supérieure ou universitaire. Elle représenterait le socle unique de leur expertise.
💬 “Le marché a changé, les métiers ont changé. À l’époque de nos parents, tu faisais un métier toute ta vie. Aujourd’hui ce qui fait la richesse de notre vie c’est qu’on a la capacité de faire plusieurs métiers et c’est ce qui va nourrir des profils T-shaped.” Elise Moron
👉 Aujourd’hui :
🌱 Ici Heather E McGowan y décrit un cycle qui se réitère sans fin : on apprend, on désapprend, on réapprend.
💬 “LinkedIn a récemment sorti une étude justement sur les 6 compétences clés qui permettent d'évaluer le potentiel d’une personne parmi lesquelles il y a le développement personnel : les gens qui remettent toujours en question l’état de leur connaissance et qui sont toujours en train d’apprendre de nouvelles choses.” Elise Moron
⚡L’ancien paradigme laisse place à une nouvelle réalité construite sur 3 temps : L’apprentissage, l’effet de levier de cet apprentissage, puis une espérance de vie prolongée.
💬 “La digitalisation de la formation fait que tu n’as pas besoin d’aller sur les bancs d’une fac ou les bancs d’une école pour acquérir des connaissances, c’est d’une part un gain de temps énorme mais aussi d’accessibilité à toute personne qui a juste une connexion internet qu’elle ait 18 ou 52 ans.
Il y a plein de contenu en ligne qui est gratuit. On n’a pas toujours forcément besoin de payer pour avoir accès à une formation.
Dans ce sens il n’y a pas ou plus de barrière à l’entrée” Elise Moron
Difficile d’imaginer dans l’ancien paradigme que décrivait Heather E McGowan une telle évolution des possibilités de se former pour monter en compétences, mais aussi pour en découvrir des nouvelles. 🧠
💬 “Et même aujourd’hui il y a plein de formations qui sont adossées à de l’intelligence artificielle où le contenu est adapté à ton propre rythme d’apprentissage. Ce qui fait que le contenu s’adapte à l’apprenant et pas à l’inverse via le machine learning.
Et ça, c’est une révolution aujourd’hui dans le monde du e-learning. Il va y avoir une vraie personnalisation dans l’apprentissage.
Et la deuxième chose qui a changé aussi la donne c’est de faire des contenus qui soient “snackables” ou facilement consommables.
On fait des contenus plus concis, précis, très utiles et très actionnables.
Avant pour te parler de marketing digital, on te faisait une présentation de deux heures sur ce qu’est le marketing digital, puis ensuite on allait dérouler tout un plan.
Aujourd’hui nous sommes sur du contenu actionnable, à forte valeur ajoutée et consommable dans un minium de temps. Tu peux apprendre de n’importe où.
C’est cette accessibilité et facilité de consommation qui fait que les gens vont de plus en plus consommer de la formation.” Elise Moron
C’est ainsi que les profils non linéaires, qui ont cumulé différents apprentissages, différentes expériences ne seront plus à terme des profils atypiques.
🚨Et c’est pour cela que les recruteurs doivent aussi s’adapter à cette évolution. Une évolution qui d’ailleurs transforme également les métiers du recrutement (RDV dans quelques lignes pour aborder ce sujet).
Comment attirer et fidéliser les profils T-Shaped
💬“Tu les trouves partout. Il n’y a pas une école à aller voir en particulier.
Quand tu rédiges ta description de poste, tu tentes de cibler le plus précisément possible ton persona. De le réduire au maximum. Si tu veux recruter un T-Shaped, il va falloir faire l’inverse, c’est à dire ouvrir ton persona.
Des fois la persona est beaucoup trop précise et réduite.
Le but quand tu veux recruter un T-shaped c’est d’ouvrir ta persona le plus possible.” Elise Moron
Tout commence par abandonner le système des cases à cocher pour se concentrer sur les attendus du poste.
💬“Là où si tu étais restée sur la plus petite niche de ton persona, tu n’aurais pas pu avoir des profils T-shaped.” Elise Moron
Pour attirer ce genre de profils, la recette sera la même que pour les fidéliser : leur permettre de satisfaire leur grande curiosité et leur soif d’apprentissage.
❌Et pas de deal si la recherche de l’entreprise se focalise que sur ses propres besoins et pas sur cette attente fondamentale des candidats qu’elle souhaite attirer.
💬 ”Ce sont des profils très curieux de nature, très empathiques aussi et donc il faut les nourrir intellectuellement et il faut leur proposer régulièrement des formations en interne.
Les T-shaped ont besoin d’être challengés très régulièrement. Si tu ne viens pas les nourrir intellectuellement, ils peuvent partir, sans besoin d’avoir un mauvais manager ou parce que le poste ou la missionne fait plus sens. Eux seront drivés par la question : est-ce qu’ils ont grandi ou pas ?” Elise Moron
L’exemple concret du T-Shaped recruteur
💬 “Les recruteurs subissent une très grande pression due à la tension du marché.” Elise Moron
👉 Le recrutement est non seulement un métier en tension, mais il fait également partie des métiers récents, du moins dans sa considération comme un métier à part entière.
💬 “Il n’y a pas à proprement parler d’études dédiées pour devenir recruteur. C’est généralement un sous-module dans les formations RH.
Et ce n’est pas proposé dans la liste des métiers possibles en sortant du bac. Perso en 2006 j’avais le choix entre ingénieur, médecin ou avocat. Un choix plutôt limité.
Presque tous les recruteurs sont issus de reconversion. Il est rare de démarrer tout de suite dans cette profession.
C’est pour ça que les recruteurs sont souvent par définition T-shaped.” Elise Moron
Mais dans le contexte dynamique dont nous avons parlé au début de cet article, le métier du recrutement évolue à la vitesse de la lumière.
💬 “C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles on a créé un Bootcamp avec Léo.
Le recrutement a changé mais les recruteurs n’ont pas changé.
Il y a quelque chose qui est cassé dans l’équation.
Pour les rendre efficaces il faut un changement de mindset, de méthodologie, d’outils.
Et ça fait beaucoup à la fois donc on essaye d’y aller doucement.
Je ne comprends pas qu’un métier comme le recrutement qui a un impact aussi important sur une société ne soit pas au même titre que les Sales, Marketing et autres, drivé par des canvas, des méthodologies, des KPIs autres que les classiques Time to Hire et Cost per Hire qui n’ont aucun sens en soi.
Candidat et client c’est le même combat.” Elise Moron
Aujourd’hui il y a de plus en plus de formations, comme la formation T-Shaped Recruiter Bootcamp d’Elise et Léo Bernard 🔥, et même une école (LEDR) 🦍 dédiées à cette profession.
On normalise et on reconnaît davantage ce métier car on comprend l’importance de son impact pour les sociétés.
Le T-shaped recruteur a donc tout à gagner en s’ouvrant à toutes les disciplines qui nourrissent aujourd’hui son métier.
Elise en citera 4 en exemple :
Sales 👉 pour vendre la meilleure opportunité (construction de l’elvator pitch, comment générer de nouveaux leads … )
Marketing 👉 pour délivrer le bon message au bon moment au bon candidat (nurturing, copywriting, NPS)
Growth Hacking 👉 pour automatiser la génération de leads et la création de landing page qui convertissent.
Psychologie 👉 pour assurer les cultural fit et recruter avec objectivité sans discrimination sans biais cognitifs.
💬 “Le tout pour devenir plus efficient.
C’est dingue de penser que le recrutement repose encore sur du feeling alors que c’est une discipline qui peut faire ou défaire des sociétés.
En recrutement on dit souvent : oui, mais c’est de l’humain tu vois ?
“Non je ne vois pas !”.
Le recrutement ce n’est pas du feeling et que de l’humain, c’est avant tout un levier business qui répond à des besoins business. J’ai entendu beaucoup de managers dire “oui mais ça fait 15 ans que je recrute moi, je connais les gens, j’ai un feeling, un quotient émotionnel particulier.”
L’expérience ne fait pas la compétence et ça, il y en a beaucoup qui ont du mal à le comprendre.” Elise Moron
Et pas besoin de se pencher sur un scénario de science-fiction pour se projeter dans l’évolution du métier. 👀
Si nous prenons l’exemple des Etats-Unis, nous pouvons déjà avoir un bel avant goût de la forte tendance à la professionnalisation du recrutement.
💬 “Là les Américains sont beaucoup plus avancés que nous.
Sur le recrutement il y a davantage de technicité et c’est vraiment vu comme une fonction aussi importante que le sales ou le marketing.
Quand tu regardes les équipes de recrutement de l’entreprise Booking par exemple, tu as un Talent Officer, bon ok comme tout le monde, mais tu as aussi un Talent Market Nuturer qui est juste là pour faire du nurturing de talent pendant que le candidat est en process et après le process avec du contenu pertinent.
Tu as un Talent Bias Officer qui est juste là pour faire en sorte que tous les recruteurs et les Hiring Managers soient conscients de leur propre biais et puissent les contrecarrer et mettre en place un canvas qui permette de structurer l’évaluation des candidats.
Tu as un Talent Data Officer qui est juste là pour tirer des insights business clés pour les recruteurs à partir de la data qu’ils ont récupérée dans l’ATS.
Tu as un panel de spécialistes dans le recrutement qui est miroir des équipes de sales qui sont spécialisées.” Elise Moron
Et en Europe, et notamment en France, il y a déjà les premières entreprises qui commencent à structurer leurs équipes de recrutement dans ce sens.
💬 “En France on n’a pas encore fait le pas, je pense par manque de connaissance sur le sujet et par manque de budget aussi.
Pour autant il y a quand même une prise de conscience. Par exemple, les équipes de Qonto, Doctolib et de certaines grosses scales up, sont en train de faire le pas et se rapprochent d’une organisation très spécialisée, même sur les fonctions recrutement.” Elise Moron
Et après ? Quand le T se transforme en PI, puis en X-shaped
Il existe toute une déclinaison des lettres qui représentent l’évolution de la répartition de nos compétences. On parle maintenant de Pi shaped, de X shaped …
💬 “Il n’y aura plus de lettres. Je pense qu’au bout d’un moment il faut s’arrêter sur les analogies et il faut juste comprendre que tout ça c’est un mélange de skills et après à toi de mettre le I où tu veux.
Les gens vont faire différents métiers dans une vie et vont évoluer en fonction des différents stades de sociétés dans lesquels ils sont.
Clairement tu vas avoir de plus en plus de compétences, annexes, connexes par rapport à ton ancienne expertise et d’ailleurs tu peux même changer d’expertise donc c’est pour ça qu’on a aussi des Pi-shaped”. Elise Moron
Les Pi-shaped ou π-shaped ont eux deux domaines d’expertise (représentées par les deux barres verticales).
💬 “Mais tout ça reste un mélange de skills et ce sera rare je pense qu’une personne reste sur le fameux i, c’est-à-dire uniquement expert dans un domaine, sans compétences généralistes. ” Elise Moron
Et par compétences il est également question de softskills.
💬 “On parle souvent des hard skills mais on oublie les softskills qui sont souvent oubliées et mal comprises car confondues avec la personnalité.” Elise Moron
Des compétences qui doivent ouvrir le recrutement à la diversité cognitive pour pouvoir assurer la compétitivité et la pérennité des entreprises. 🌈
C’était le mot de ma fin.
J’espère que cet article vous aura été utile.
À très bientôt et bons recrutements ! 👌