Recruter, “ça ne s'improvise pas” comme le disent certains.
Structurer son processus de recrutement, c’est tout un art.
Alors que plus d’1 recrutement sur 2 est estimé difficile selon France Travail en 2024, combien d’entreprises s’appuient encore sur des tests peu adaptés ou des décisions prises au feeling ?
Manque de méthodologie, critères flous, candidats mal évalués, et autant d’erreurs possibles pour les entreprises, mettant en péril leur performance, leur marque employeur et la stabilité de leur équipe.
Comment passer d’un recrutement approximatif à un processus structuré ?
Je vous embarque aujourd’hui dans les coulisses de Pictarine, où Akram Bougrine, Lead People Acquisition, a contribué à enrichir le processus de recrutement. De la structuration des étapes, à la conduite d’entretien, en passant par la création d’un guide, avec un objectif clair : professionnaliser leurs recrutements pour dérisquer chaque embauche en maximisant la qualité de l’évaluation.
Une transformation qui amène les membres à devenir des vrais détectives du recrutement, pour plus de précision et d’efficacité.
Structurer son processus, OK, mais pourquoi ?
Structurer son processus de recrutement permet de mieux évaluer les candidats, de réduire les erreurs de casting et donc de renforcer la qualité des recrutements.
Chez Pictarine, tout part de 2 constats et de prises de conscience.
Tout d’abord : un manque d’approfondissement dans les entretiens.
Certains nouveaux managers avaient une approche presque trop bienveillante en entretien. Ils n’osaient pas poser de questions difficiles ou ne creusaient pas nécessairement les réponses des candidats. Ils restaient donc en surface.
Ensuite : une montée conséquente du volume des recrutements.
Pictarine a connu une accélération importante de ses recrutements et il était devenu impératif de professionnaliser davantage leurs méthodes d’évaluation pour garantir des recrutements de qualité malgré un rythme soutenu.
“En fait, notre envie était d’aller à l’opposé de la question trop large et souvent posée en entretien : “est-ce que tu peux me raconter ton parcours ?” Notre envie était d’approfondir les entretiens et d'améliorer les évaluations, pour dérisquer au maximum chaque embauche.” Akram
Un processus en 5 étapes : ni plus, ni moins !
Avant toute chose, il est essentiel de définir précisément les étapes du recrutement et leur rôle dans l’évaluation des candidats.
Puis les appliquer pour tous les recrutements, pour plus d’uniformisation, tout en adaptant et ajustant évidemment le contenu en fonction du besoin et du poste, dans un principe d’amélioration continue.
Un travail mené en concertation avec les hiring managers de Pictarine pour s’assurer d’une cohérence dans le process.
Étape 1 : Screening et préqualification par l’équipe RH
Premier échange avec le candidat. Le but ? Vérifier les prérequis, la motivation et le premier fit avec le poste.
Étape 2 : Entretien n°1 avec le/la manager
Un entretien pour évaluer les soft skills/savoir être et les logiques de travail.
Étape 3 : Test immersif, une évaluation en conditions réelles
Celle-ci mérite plus de détails…
Contrairement aux tests classiques que l’on connaît, Pictarine prévoit un test dit immersif dans son parcours, qu’Akram et la team acquisition challengent via la communication qui l’entoure et une clarification régulière des intentions et objectifs qui se cachent derrière.
Ce test, plus engageant et réaliste, vient évaluer les hard skills et la manière de collaborer.
Pour mieux comprendre, voici le déroulement :
- Un cas pratique inspiré de problématiques réelles
- 2 heures pour résoudre le problème, sur place, avec accès aux équipes
- Une restitution finale de 30 minutes
- L’évaluation de la méthodologie et de la gestion du temps plus que du résultat brut
Pourquoi les candidats adhèrent à cette méthode ?
- Le test est cadré et limité dans le temps
- Il est réalisé dans un contexte d’entreprise, favorisant une immersion réelle, comme si le candidat était déjà collaborateur
- C’est aussi une façon de découvrir la culture et l’équipe avant de s’engager
Étape 4 : Prise de références
Un contrôle de références a pour but de valider la cohérence du discours du candidat et de verrouiller des points sur lesquels il peut y avoir des doutes. Certes.
Mais il doit surtout être mené avec un cadre, un peu à l’image de l’entretien structuré.
L’idée, ce n’est pas juste de demander ce que son ancien manager pense d’un candidat, mais de creuser à travers des questions comportementales, comme par exemple “racontez-moi une fois où il/elle a été amené à gérer un conflit”, d’obtenir des illustrations très concrètes, ou encore de faire parler de projets passés, pour obtenir du factuel.
Akram et son équipe s’assurent de croiser les perspectives en réalisant 3 prises de références, en incluant systématiquement au minimum un retour de manager direct. Cette diversité de regards permet d’obtenir une vision plus objective et nuancée du parcours du candidat.
Étape 5 : Entretien final avec 2 membres du Codir
Cet entretien est une bonne occasion pour le candidat de questionner des personnes qui ont une vue macro et stratégique sur la direction que prend Pictarine.
Conduire un entretien, ou comment mener une enquête constructive
Pour harmoniser les entretiens et éviter les biais de recrutement, Akram et sa team ont développé un document interne via Notion appelé "Detective Mindset", utile à toutes étapes.
L’objectif du guide : partager des conseils actionnables pour identifier les zones d’ombre, oser les creuser et consolider l’autonomie des managers.
“On a besoin de passer de “je crois” à “je sais”, et ça le plus tôt possible dans le processus de recrutement et avant l’entretien final. Et donc d’établir des critères factuels d’évaluation.” Akram
Les 4 principales clés à retenir de ce guide.
Clé n°1 : Prérequis et préparation
Chez Pictarine, ils ont alors détecté 3 prérequis à bien verrouiller avant de recruter, qui forment la base de ce guide.
- Travailler et valider la fiche de poste entre le People dev et le manager
- Se poser la question de la pertinence d’un recrutement long terme vs besoin court terme, et externe vs interne
- Réfléchir à l’évolution du poste : va-t-il s’enrichir ou se dégarnir dans les prochains mois/années ?
Le guide encourage ensuite :
- La création d’une scorecard avec les critères de succès du poste avant de commencer la phase d’entretien
- L’analyse de poste et le classement des facteurs clés et des bloqueurs potentiels par ordre de priorité
- La préparation d’au moins 2 questions ciblées pour chaque critère
- Le listing des réponses idéales et des signaux d’alerte associés
Clé n°2 : Recherche et investigation
La recherche d’informations en amont sur les candidats est préconisée, que ce soit via le CV, les réseaux sociaux ou le web plus largement. Elle permettra de comprendre son contexte, voire même de relever des éléments surprenants et des perches pour des questions, afin d’affiner les échanges.
“Nous sommes aussi particulièrement attentifs à la qualité des contenus et de la communication des candidats, que ce soit sur Github, Linkedin ou via leur portfolio, et ce qu’il/elle décide de mettre en avant. Ça peut mener vers des discussions intéressantes en entretien.” Akram
Clé n°3 : L’art du questionnement
Selon Akram, l’idée, c’est de construire son entretien en mode entonnoir : des questions très larges vers du très spécifique pour aller chercher éventuellement des pistes à décortiquer.
1 - Encadrer les attentes de l’entretien, pour exprimer clairement au candidat ce que l’on attend de lui.
“Au niveau de l’expérience candidat, ça c’est un petit plus mais qui fait d’énormes différences. Au démarrage, je vais toujours préciser à mon candidat ce que j’attends de lui dans cet entretien, comme le fait qu’il utilise le “je” plutôt que le “on”, de me donner des réponses synthétiques, ou même de me donner des exemples concrets.” Akram
2 - Commencer par des questions presque trop larges, comme “à quoi tu dois ta réussite ?” pour valider la cohérence de ce qui est dit par rapport aux attentes.
3 - Utiliser des questions combinées, à la fois situationnelles (ex : “donne-moi un exemple d’une fois où tu as…”) et de “prise de hauteur” (ex : “avec du recul qu’est-ce que tu aurais pu faire différemment ?”)
4 - Détecter les incohérences. Il est question de reformuler et d’insister sur les aspects vagues, pour obtenir des réponses précises.
“La bienveillance n’empêche pas l’exigence. Je pense qu’il est primordial de guider directement le candidat pour obtenir l’information dont on a besoin. Et je vais oser lui dire s’il le faut “là tu restes trop en surface, j’aimerais que tu ailles plus dans le concret”. Et ça passe, puisque je lui ai donné le cadre en début d’entretien. C’est aussi un moyen de lui donner une chance de réorienter son propos et d’observer sa réceptivité au feedback.” Akram
Clé n°4 : Oser réseauter, oser déformaliser
Meetup, évènement public, café… Chez Pictarine, ils aiment profiter d’un contexte informel pour rencontrer des talents potentiels et encouragent fortement leurs équipes à le faire.
Car un bon recrutement ne commence pas toujours par un CV et les opportunités peuvent naître là où on ne les attend pas.
Quand recrutement structuré rime avec humanité
L’adéquation culturelle pèse dans la balance du succès. Et chez Pictarine, la culture du dépassement de soi est un élément central. Elle est induite par une de leurs valeurs phares, ”ignite your spark”, incitant à bien se connaître soi-même et à assumer sa singularité.
C’est-à-dire ?
“L’unicité, tout comme le dépassement de soi, pour nous, ce sont des critères d’évaluation à part entière. Ça révèle la maturité du candidat et sa capacité à se remettre en question. Cet état d’esprit favorise un climat de confiance et d’apprentissage au sein des équipes, et ça permet de mesurer l’adaptabilité et l’ouverture au feedback.” Akram
À tel point qu’à l’occasion de leur rituel, le “All Hands”, une réunion qui rassemble toute l’entreprise pour diffuser des informations clés, ils y ont ajouté un challenge d’éloquence.
C’est ainsi qu’Akram s’est ouvert face à ses collègues pour partager un sujet personnel. Et ça, il a pu le faire parce qu’il était en confiance, mais également parce qu’il a bénéficié d’un coaching en prise de parole.
Un exercice périlleux et marquant, qui souligne qu’ici, évoquer ses expériences, comme ses doutes et ses échecs, ce n’est pas perçu comme une faiblesse, mais comme un levier de croissance et de cohésion.
Chez Pictarine, la rigueur du processus coexiste avec cette culture, où l’authenticité et la capacité d’introspection sont valorisées dès l’entretien.
Parce que structurer un recrutement ne signifie pas gommer l’humain.