Cet article est une synthèse du quatrième épisode de la série Etage RH.
Rien ne vaut le visionnage complet.
🍿Merci à Hélène, Marie-Sophie, Arnaud, Anaïs, Loubna, Sandrine, Bérangère, Yas&fan.
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« Je me présente, j’m'appelle Anaïs, Je fais semblant d’aimer votre entreprise… Moi j'veux juste payer mon loyer, j'en peux plus d’ refaire mon CV… »
C'est sur cette audition improvisée que s'ouvre cet épisode de notre série Étage RH. Une scène d'ouverture décalée qui pose immédiatement la question centrale : jusqu'où sommes-nous prêts à aller pour évaluer un candidat ? Entre les techniques à la mode, le poids de nos propres biais et les questions rituelles, il est temps de faire le tri. Décryptage d'un épisode qui déconstruit les mythes de l'évaluation pour revenir à l'essentiel.
Le "Recrutainment" : la fausse bonne idée du recrutement ludique
L'épisode nous plonge d'emblée dans le concept de "recrutainment", cette tendance qui mélange recrutement et divertissement. L'intention semble louable : rendre le processus moins anxiogène, plus humain, et faire tomber les masques pour découvrir la "vraie" personnalité des candidats à travers des escape games, des tournois de poker ou des épreuves sportives.
Pourtant, la critique est acerbe. Ce qui se veut innovant vire souvent au "concours Lépine des idées décalées", créant des situations artificielles, infantilisantes et rarement pertinentes pour le poste à pourvoir.
Le message est clair : les candidats ne cherchent pas une séance de théâtre improvisé, mais un processus juste, clair et aligné avec les compétences requises.
Le piège de l'intuition et des biais cognitifs
Même sans tomber dans l'excès du recrutainment, le processus de recrutement reste semé d'embûches. La plus grande ? Notre propre cerveau. L'épisode le rappelle avec une statistique frappante : 77 % des DRH, 64 % des managers et 63 % des recruteurs font confiance à leur intuition pour recruter(*).
Or, cette intuition est souvent le masque de nos biais cognitifs, ces raccourcis mentaux inconscients qui nous font préférer un candidat qui nous ressemble ou qui "a l'air sympa". Comme le souligne une citation d'Einstein dans l'épisode : « Il est plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé. »
Faut-il pour autant baisser les bras ? Non. La solution est d'apprendre à "penser contre son cerveau" en s'entourant de garde-fous méthodologiques :
- Entretiens structurés pour poser les mêmes questions à tous.
- Grilles d'évaluation basées sur des critères objectifs.
- Recours au collectif pour croiser les regards et diluer les biais individuels.
Le stress : ce juge de paix illégitime
Le stress ressenti lors d'un entretien n'a rien à voir avec le stress opérationnel en situation de travail. Pousser un candidat à bout ne révèle pas sa capacité à gérer des dossiers complexes, mais plutôt notre propre incapacité à créer un cadre d'évaluation sain.
L'objectif d'un entretien devrait être de reproduire au maximum le contexte de travail réel dans un cadre sécurisant et lisible. En expliquant au candidat ce qui va être évalué et comment, on lui donne les moyens de montrer le meilleur de lui-même. Un processus aux étapes floues et sans nouvelles ne teste pas la résilience, il ne fait qu'user les candidats.
Intuition vs méthode : déconstruire les reliques de l'entretien
Le "feeling" et l'intuition s'appuient souvent sur des reliques de l'entretien, comme la fameuse question sur les "qualités et défauts". L'épisode est catégorique : elle ne sert à rien. Les réponses sont soit préparées, soit récitées, et ne donnent aucune information sur la capacité réelle du candidat à effectuer ses missions.
La clé est de comprendre qu'une compétence n'existe que dans un contexte. Le dynamisme ou la rigueur ne sont pas des traits abstraits ; ils se manifestent dans des situations concrètes. Pour les observer, il faut une structure, une méthode, et non une partie de poker menteur.
Le mirage de la motivation
Enfin, l'épisode s'attaque au Graal du recruteur : la motivation. Nous la cherchons partout, mais nous la comprenons souvent mal. On confond l'envie, l'enthousiasme passager ou un sourire éclatant avec un alignement de fond.
La motivation n'est pas un trait de personnalité, mais un état contextuel qui dépend de l'environnement, des missions et du moment de vie. Au lieu de demander "Êtes-vous motivé(e) ?", il serait plus pertinent de chercher à comprendre "Qu'est-ce qui vous motive dans votre travail ?". L'enjeu n'est pas de déceler une étincelle le jour J, mais de s'assurer qu'un alignement durable est possible.
Conclusion : Revenons à l'essentiel
Le message final de l'épisode est un appel à la simplicité et au bon sens. Le recrutement n'est ni un jeu, ni une épreuve de Koh-Lanta. C'est avant tout un moment où deux parties – un individu et une organisation – essaient de déterminer si elles peuvent construire quelque chose de solide ensemble.
Pour le savoir, il n'y a pas de recette magique. Il faut simplement les mettre dans les meilleures conditions possibles pour le découvrir.
Alors, laissons le show aux artistes et adoptons la devise de l'épisode : Recrutez avec méthode. Pas avec des intuitions en freestyle.
(*) Baromètre « La place de l’intuition dans le recrutement » - WeSuggest-PerformanSE - 2023