Les 4 temps stratégiques en recrutement

Oriane Santhasouk
Les 4 temps stratégiques en recrutement

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Recruter, c’est loin d’être un chemin tranquille et linéaire. C’est au contraire un process vivant, où chaque étape compte.

Un brief mal cadré ? Tu pars dans la mauvaise direction.

Un sourcing bancal ? Tu passes à côté des bons profils.

Une évaluation mal réalisée ? Erreur de recrutement.

Un closing raté ? Ton meilleur candidat te file entre les doigts.

Bref, une étape ratée et c’est tout ton recrutement qui part mal. Avec à la clé : du temps et de l’énergie perdus, et parfois aussi beaucoup d’argent pour l’entreprise.

La bonne nouvelle ? Ces étapes peuvent aussi être des vrais filets de sécurité pour t’assurer que ton recrutement va dans la bonne direction.

Alors je te propose de revoir ensemble les 4 temps stratégiques d’un recrutement : les erreurs qu’on fait tous, et les bonnes pratiques qui changent tout.

Temps stratégique n° 1 : Le brief

Commençons par le tout début du process.

Quand un manager te dit : “Il me faut un BizDev senior, 10 ans d’expé minimum.”

Si tu prends ça tel quel, tu vas droit dans le mur.

Un brief mal cadré ou incomplet, c’est la garantie de présenter des profils à côté de la plaque. Résultat : triple frustration. Pour toi, pour le manager et pour les candidats.

La bonne réaction dans ce cas, c’est de poser tes limites :“Non, je ne peux pas travailler avec seulement ça. On doit prendre le temps d’en discuter.”

A l’inverse, bien mené, il donne une direction claire et renforce ta crédibilité auprès du manager.

Les erreurs fréquentes

On est tous passés par là :

  • Recycler une vieille fiche de poste. Parce que c’est plus rapide, on reprend le doc déjà existant… même s’il ne correspond plus vraiment au besoin.
  • Accumuler des critères sans prioriser. On veut être sûr de ne rien rater, alors on ajoute tout ce qui nous passe par la tête. Mais à force, on se retrouve avec une liste interminable digne du mouton à cinq pattes. Et derrière, impossible de savoir ce qui est vraiment essentiel.
  • Oublier le contexte global. Sous la pression de l’urgence, on pense “remplacement asap” plutôt que vision long terme. Du coup, on passe à côté de la  dimension business et culturelle par exemple.

Les bonnes pratiques

Alors comment faire mieux ? Quelques repères utiles :

  • Challenger le manager. Ne prends pas sa demande au pied de la lettre. Pose des questions, creuse, pousse-le à préciser ce qui compte vraiment.
  • T’appuyer sur les “incidents critiques”. Demande-lui de raconter un moment où quelqu’un a vraiment réussi dans ce rôle, et un autre où ça s’est mal passé. Les histoires qui vont t’être racontées révèlent beaucoup mieux les compétences clés que n’importe quelle liste théorique.
  • Faire la différence entre must-have et nice-to-have. Les premiers sont non négociables, les seconds sont un plus, mais ne sont pas indispensables.
  • Intégrer le contexte. Style de management, dynamique d’équipe, enjeux business…souvent, ce fit est aussi important que la technique.

Et tout ça, au passage, te permet de montrer ta valeur en tant que recruteur : tu n’es pas juste là pour exécuter, tu aides le manager à clarifier son besoin et à poser les bases d’un bon recrutement. Bref, tu joues ton rôle de business partner.

Exemple

Quand je recrutais en ESN, une demande classique c’était un chef de projet IT “senior, minimum 5-7 ans d’expérience”.

À première vue, ça paraît logique : plus d’expérience = plus de maîtrise.

Sauf qu’en creusant, on s’aperçoit que les vrais succès dans ce poste n’avaient rien à voir avec la durée d’expérience. Ce qui faisait vraiment la différence, c’était la capacité à embarquer une équipe tech et à parler avec le métier sans crisper tout ce petit monde.

À l’inverse, certains profils avec +15 ans de métier avaient échoué : trop rigides, trop centrés sur la méthode.

Du coup, au lieu de chercher uniquement des CV “senior”, on est allé chercher des candidats plus relationnels.

Le guide vidéo : maîtriser l'art de la prise du besoin

Pour aller plus loin et illustrer concrètement comment transformer ce brief en un véritable atout stratégique, le premier épisode de la série Etage RH est consacré à ce sujet crucial.

Il aborde avec humour les erreurs classiques (le fameux mouton à 5 pattes, ça vous parle ?) et partage une méthode simple pour aligner manager, RH et finance dès le départ.

Appuyez sur play pour un concentré de conseils pratiques !

➡️ Et pour celles et ceux qui veulent garder une trace écrite, retrouvez la synthèse complète et la transcription de l'épisode juste ici.

Temps stratégique n°2 : le sourcing

Le sourcing, ce n’est pas juste “trouver des CV”.

Le vrai enjeu, c’est de repérer les bonnes personnes, réussir à capter leur attention, et leur donner envie de te répondre.

Parce qu’entre un candidat noyé sous 50 messages LinkedIn par semaine et une annonce perdue au fond d’un jobboard, la différence se fait dans la qualité de ta recherche et dans la manière dont tu entres en contact.

Un sourcing efficace, c’est celui qui t’amène les bons profils, au bon moment, grâce un message pertinent.

Les erreurs courantes

  • Se contenter de poster une annonce générique. Pour moi, c’est clairement le canal le plus sous-coté. Quand ça ne marche pas, ce n’est pas forcément le canal qui est mauvais… c’est souvent que l’annonce ne dit pas assez de choses concrètes pour donner envie de répondre.
  • Chercher toujours au même endroit. LinkedIn et Indeed, c’est pratique… mais pas universel. Pour beaucoup de métiers, ce ne sont pas les bons canaux. La vraie question, c’est : où est ton persona ? Étudie ses pratiques, et va là où il est vraiment, pas là où tu aimes bien sourcer.
  • Envoyer des messages copiés-collés trop larges. Le copier/coller n’est pas un problème en soi, à condition qu’il soit pertinent pour un segment précis. Mais un message trop générique finit vite perçu comme du spam. Et là, non seulement tu n’as pas de réponse, mais en plus tu dégrades ton image de recruteur (et celle de toute la profession !).

Comment faire mieux

  • Varier les canaux. LinkedIn, c’est bien, mais pense aussi aux communautés spécialisées, aux forums, aux écoles, aux événements, à la cooptation… et à ton ATS, qui a souvent plus de ressources que tu ne crois.
  • Soigner tes messages. Le sujet n’est pas de bannir le copier/coller, mais de l’utiliser intelligemment. Un message pensé pour un persona précis peut être réutilisé plusieurs fois et marcher très bien. Ce qui compte, c’est de montrer que tu sais à qui tu t’adresses.
  • Mettre en avant le projet. Pas juste “youhou on recrute”, mais “voilà le challenge, voilà l’impact que tu peux avoir”. C’est ça qui donne envie de répondre.
  • Anticiper. Travailler ton vivier avant d’avoir un besoin urgent. Même quelques contacts entretenus au fil de l’eau te sauveront la mise le jour où la demande tombe.
  • Soigner l’expérience dès le premier contact. Même si la personne ne va pas au bout, elle doit repartir avec une bonne image de toi et de ton entreprise.

Exemple

Je recrutais pour une crèche.

Premier réflexe : LinkedIn. Résultat ? Zéro réponse aux quelques messages envoyés.

En creusant, je comprends que les pros de la petite enfance ne sont pas sur LinkedIn. Leur terrain de jeu, ce sont les groupes Facebook spécialisés. C’est là que j’ai posté, et que les candidatures qualifiées sont arrivées.

Moralité : il n’y a pas de canal miracle en sourcing, juste le bon endroit pour le bon poste.

Temps stratégique n° 3. L’évaluation

Tu as trouvé des candidats ? Très bien.

Mais si ton évaluation est bancale, tu risques encore de faire rater tout ton recrutement.

L’entretien, c’est le moment où tu dois savoir si la personne va réussir dans le poste et dans l’équipe. Pour ça, il faut une méthode.

Les erreurs les plus fréquentes

  • Se fier uniquement à son intuition. Le fameux “je le sens bien”. Ton cerveau adore juger en deux minutes… mais il est bourré de biais, souvent inconscients et parfois discriminants. Alors qu’on cherche à évaluer les compétences et le fit avec le poste et l’équipe, on se laisse influencer par des choses qui n’ont rien à voir (est-ce qu’on trouve la personne sympa, est-ce qu’elle nous ressemble, est-ce qu’elle correspond à nos codes culturels,…)
  • Multiplier les entretiens pour se rassurer. Quand chaque échange n’a pas d’objectif d’évaluation clair, ça tourne à la redite et ça fait perdre du temps à tout le monde. Si on revoit les candidats “parce qu’on n’est pas sûrs”, ce n’est pas eux le problème… c’est le process de décision (et souvent, les critères).
  • Se laisser aveugler par un CV clinquant. Un parcours brillant sur le papier ne dit rien sur la façon de travailler au quotidien. On se rassure avec de beaux diplômes ou de grands noms d’entreprises, mais ça ne garantit pas les compétences. En plus, le CV raconte une histoire souvent embellie. Ce qui compte en entretien, c’est de vérifier ce que la personne sait vraiment faire et comment elle le fait.

Comment évaluer efficacement

  • Structurer les entretiens. Prévois à l’avance qui évalue quoi et à quel moment. Par exemple : un entretien centré sur les compétences techniques, un autre sur la collaboration avec l’équipe, etc. Ça évite les doublons et ça permet de couvrir tous les angles sans rallonger inutilement le process.
  • Privilégier les questions comportementales. “Raconte-moi une situation où…” permet de voir comment la personne a ou aurait réagi en vrai, plutôt que d’obtenir des réponses théoriques ou attendues.
  • Poser les mêmes questions à tous les candidats. Ça permet de comparer objectivement les réponses et d’éviter que ton choix repose uniquement sur ton ressenti du moment.
  • Prendre les références avec prudence. Ça peut donner un éclairage, mais ce n’est jamais une vérité. Demander à un ancien manager, c’est un peu comme appeler l’ex de quelqu’un : tu n’as aucune idée du contexte de leur relation.

Et surtout, rappelle-toi : l’entretien est un échange à double sens. Le candidat t’évalue autant que tu l’évalues. Une bonne expérience d’entretien pèse déjà dans sa décision finale.

Exemple

Je recrutais un·e directeur·trice pour mon coworking.Deux bons candidats en short list, impossible de les départager à chaud.

On s’est appuyés sur notre pondération des critères : donner plus de poids à ceux qui sont les plus longs à apprendre, et moins ceux qui sont les moins critiques.

C’est ça qui nous a permis de trancher. Est-ce que ça a marché ? Réponse dans deux mois : la personne est encore en période d’essai !

Temps stratégique n°4. Le closing

Tu penses que tu as fait le plus dur quand  le bon candidat identifié ? Malheureusement non !

Maintenant, l’enjeu, c’est de décrocher un double “oui” : celui du manager, et celui du candidat.

Sans l’adhésion du manager, tu peux tout recommander : c’est lui ou elle qui a le dernier mot !  Sans l’engagement du candidat, retour à la case départ. C’est pour ça que le closing est une étape à part entière.

Les erreurs fréquentes

  • Attendre la fin pour parler des attentes. Salaire, télétravail, perspectives… si tu repousses ces sujets, tu prends le risque d’un gros décalage au moment de l’offre. Et quand ça coince, peu importe la qualité du process avant : tout ça n’a servi à rien.
  • Décider trop lentement. Le fameux “on va voir encore un profil pour comparer”. Ça rassure sur le moment, mais en marché tendu, c’est la meilleure façon de voir ton candidat signer ailleurs.
  • Ne pas impliquer le manager. Sans lui, c’est mission impossible. Le recruteur peut cadrer et conseiller, mais au final c’est le manager qui porte le besoin et qui doit s’engager.

Les bonnes pratiques

  • Clarifier tôt. Parler package, organisation, télétravail, perspectives dès les premiers échanges. Mieux vaut lever les doutes au départ que de tout faire capoter au moment de l’offre.
  • Aller vite. Une fois la décision prise, formule l’offre sans traîner. Une proposition claire, envoyée rapidement, ça veut dire : “on te veut vraiment dans l’équipe”.
  • Mettre le manager en première ligne. Le closing, ce n’est pas qu’une étape administrative : c’est au manager de créer le lien direct avec sa future recrue et d’incarner le projet. Un dernier échange, même informel, peut faire toute la différence.
  • Soigner la dernière impression. L’annonce compte autant que le contenu. Un appel personnalisé, un mail positif et bien rédigé, une attitude enthousiaste… C’est ce que le candidat retiendra, qu’il dise oui ou non.

Exemple

A L’Ecole du Recrutement, on a mis en place l’entretien inversé : laisser le candidat poser toutes ses questions à l’équipe, avant d’accepter ou de décliner notre proposition d’embauche.

L’idée est simple : puisqu’il nous évalue autant qu’on l’évalue, autant lui donner un vrai espace pour le faire.

Grâce à ça, quand les personnes disent “oui”, c’est en toute confiance. Pas parce qu’on les a “convaincues”, mais parce qu’elles ont obtenu toutes les réponses dont elles avaient besoin pour se projeter sereinement.

Conclusion

Dans un recrutement, chaque temps du process compte : le brief, le sourcing, l’évaluation et le closing.

Si tu bâcles seulement l’un d’entre eux, tu le payes forcément plus tard. Mais quand tu les mènes bien, ça change tout : tu fais des choix plus justes et tu donnes envie aux bonnes personnes de te rejoindre.

Au final, un “oui” n’a rien d’un coup de chance. C’est le résultat d’un process bien construit, étape après étape.

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